Pas trop de hockey ici, mais une leçon qui peut changer votre vie. Voici un petit article sur l'utilisation d'un mot dont on fait usage un peu trop souvent dans le monde du sport en le sortant de sa signification courante. Si vous aimez la langue française et le sport, vous pouvez parfois avoir de la misère à marier ces deux passions à l'écoute de lignes ouvertes à la radio ou d'émission sportives à la télé par l'usage de la langue française qu'on y fait. Pour ma part, ça ne me dérange pas trop par exemple d'entendre les gens dire des "si j'aurais" sur les ondes de TQS, ça fait peut-être un peu parti de la game, de massacrer les conjugaisons de verbe, mais certaines utilisations de mots peut "gosser" un peu plus ma patience et me faire grincer les dents... J'aimerais, en tant que sociologue, parler ici de l'utilisation du mot positivisme dans les médias sportifs. Mauvaise utilisation quand même assez sournoise qui me scie la plupart du temps en deux.
On s'entend bien, je ne veux pas jouer le gars condescendant qui veut faire la morale sur la langue française. Je me dis simplement que la plupart des gens n'ont pas étudié en sciences sociales ou en philosophie et ne savent peut-être pas ce qu'ils font une erreur en utilisant ce mot. Je comprends que l'utilisation du mot positivisme par exemple par notre ami Jean-Charles Lajoie et ses auditeurs n'est pas faite d'une manière déplacée. Je dirais même que ça pourrait être plus logique d'utiliser le mot positivisme plutôt qu'utiliser le mot optimisme parce étymologiquement, ça fonctionne peut-être mieux. Mais la langue française n'étant pas à une chose complexe près, quand on est optimiste, on est rarement positiviste...
Le positivisme est donc une philosophie moderne qui a eu une influence énorme sur la pensée occidentale qui fut popularisée par Auguste Comte (1798-1857), celui-là même que l'on crédite souvent comme l'inventeur de la sociologie. Selon lui, l'esprit cognitif de l'humanité se développe d'une manière inexorable selon trois périodes historiques successives, la période théologique ou féodale, la période métaphysique ou abstraite et la période scientifique ou positive. Selon ce raisonnement, l'humanité traverserait donc trois phases de développement de la compréhension du monde à la manière de l'enfance, l'adolescence et l'âge adulte d'un homme moyen. La première étant la phase où les explications sur le monde se font selon le Droit divin, donc par le religieux. Il s'agit de la période qui caractérise l'humanité jusqu'à l'Ancien Régime. La seconde phase est celle métaphysique, celle qui caractérise l'esprit des Lumières où la société serait régularisée selon des bases abstraites et idéalistes fondées sur l'état de l'humanité comme par exemple dans le Contrat Social de Jean-Jacques Rousseau. La dernière phase est celle où l'esprit humain en vient à la conclusion qu'on ne peut comprendre ni l'origine, ni la destination de l'univers. L'homme renonce donc à la question du "pourquoi?" et recherche par l'usage unique du raisonnement et de l'observation les lois effectives de la nature. Il s'agit donc du triomphe de la Raison, de l'Homme et du Progrès, le triomphe de la modernité... L'humanité aura à maîtriser successivement des sciences afin parvenir à l'âge positif. Ces sciences sont dans l'ordre : les mathématiques, l'astronomie, la physique, la chimie, la biologie et enfin la sociologie comme science ultime de l'âge positif. C'est Compte d'ailleurs qui inventa le mot sociologie, rien de moins!
À l'époque où écrit Comte, les sciences sociales sont un outil s'opposant aux sociétés traditionnelles et militant en faveur du déploiement de la philosophie moderne. Il n'est donc pas surprenant de voir une attitude de propagateur de philosophie se muter en un discours quasi-religieux chez ce dernier. Compte n'était pas seulement un philosophe qui voulait voir naître une science, mais il avait une attitude de fondateur de religion, la religion positiviste. Cette religion est selon lui la religion de l'humanité, religion sans Dieu où l'homme adore l'humanité. Cette philosophie a eu un impact sur la société du 19e siècle qui persiste non seulement dans le discours scientifique contemporain mais également en des lieux où on ne le soupçonne pas. La "religion positiviste" a tellement eu un impact sur la société brésilienne par exemple que la devise du pays que l'on retrouve sur le drapeau brésilien, "Ordem e progresso", est, en fait, la devise du positivisme, "ordre et progrès"... Cette "religion" prévoyait également une paix universelle pour le XXe siècle... On voit que l'engouement pour cette religion n'a malheureusement pas eu l'effet escompté sur l'histoire de ce siècle...
Bref, le positivisme est une école de pensée qui a vécu son apogée au milieu du XIXe siècle est n'est donc pas un état d'âme où l'on voit le monde d'une manière positive, de voir du bon oeil même des évènements fâcheux et décevants comme la saison 2008-09 des Canadiens de Montréal...
Voici la leçon : Vous n'êtes donc pas positivistes à l'idée de voir Vincent Lecavalier jouer à Montréal, vous êtes plutôt optimistes.
Vous pouvez maintenant répéter cette phrase et utiliser le mot optimisme à la place de positivisme la prochaine fois que vous ferez une apparition dans les médias!
Bien dit Martin!
RépondreSupprimerThomas
Merci de rendre justice à cette belle langue qui est la nôtre et que, par un obscur complexe d'infériorité historique, les Québécois massacrent.
RépondreSupprimerMartin !
RépondreSupprimerExcellent billet :)
Ah! Bonjour Catherine!
RépondreSupprimerexcellent blog, Martin. Ton style et ton choix de sujets me rejoignent. Nice job.
RépondreSupprimerNick T.
6 Verges et les Buts