lundi 11 août 2014

Steve Buzinski








Il est difficile pour nous d’imaginer tous les impacts qu’a eu la Deuxième Guerre Mondiale sur la vie de ceux qui l’ont vécue.  À ce chapitre, la Ligue Nationale n’a pas fait exception.  La prolongation a été abolie le 21 novembre 1942, en raison des restrictions quant au voyagement.  Les trains ne pouvaient pas partir au-delà d’une certaine heure.  Elle n’a été rétablie que plus de quarante ans plus tard.
De nombreux joueurs établis ont aussi été conscrits, laissant des trous béants dans les alignements.  Pour les remplacer, on embaucha des joueurs n’ayant pas encore atteint l’âge de la majorité (voir texte du 1er avril 2013) ou des joueurs des ligues mineures parmi ceux qui n’avaient pas été conscrits.
Les Rangers, ayant déjà peu de profondeur, furent particulièrement affectés par cette situation.  Par exemple, pour la saison 1942-43, leur défensive fut complètement décimée.  De l’année précédente, il ne restait qu’un seul joueur, Ott Heller.
Le filet n’y fit pas exception.  Dans une période où les équipes n’alignaient qu’un seul gardien (voir texte du 6 mai 2013), leur cerbère, Sugar Jim Henry, fut aussi conscrit.  Le directeur-gérant des Rangers, Lester Patrick, tenta alors de se rabattre sur Omer Kelly, un gardien de l’AHA.  Mais comme celui-ci ne pouvait pas s’absenter de son emploi dans une manufacture de guerre, il perdit ainsi son opportunité de jouer dans la LNH et n’y parvint jamais.
Les Blueshirts durent donc se résigner à inviter des inconnus à leur camp.  Parmi eux, il y avait un petit gardien de 5’7’’, 140 lbs aux jambes arquées, Steve Buzinski.  Ce dernier jouait au sein de l’équipe senior de sa ville de Swift Current, en Saskatchewan, et celle-ci eut un certain succès dans la compétition pour la Coupe Allan en 1940 et 1941.  Buzinski connut un camp potable et prit le filet pour le début de la saison.
Dès son premier match, il alloua sept buts.  À son deuxième?  Douze, dans un match où Carl Liscombe, des Red Wings, établit le record d’alors, en récoltant sept points.  Après une première victoire serrée, 4-3, contre Montréal, les Canadiens eurent la chance de se reprendre.
Voulant montrer qu’il était en contrôle, il fit un arrêt du gant et se tourna ensuite vers son coéquipier Ott Heller.  Il lui dit alors qu’il n’y avait rien là, que c’était aussi facile que de cueillir des pommes.  Il accorda ensuite dix buts, incluant le premier de la carrière de Maurice Richard, dans une défaite des Rangers, 10-4.
Dans un match contre les Leafs, il y eut de l’action autour de son filet, qui résulta en un autre but.  Sur le jeu, Buzinski s’écrasa sur la glace et semblait inconscient.  Il y eut donc un argument à savoir si c’était un coup de bâton (ce qui aurait invalidé le but) ou la rondelle qui l’avait mis dans cet état.  C’est alors que Buzinski se releva pour crier que c’était le bâton, avant de se réécraser sur la glace.  Son coéquipier Lynn Patrick cessa donc d’argumenter pour plutôt éclater de rire…
Buzinski était très apprécié de ses coéquipiers et il les amusait beaucoup, même si c’était souvent involontaire.  Toutefois, cela ne lui donnait pas plus de talent.  Il hérita d’ailleurs du surnom « The Puck Goes Inski ».  Après neuf matchs, il avait accordé 55 buts, pour une moyenne de 5,89.  Les Rangers décidèrent que c’en était assez.  Buzinski fut assigné au club affilié de New Haven.  Mais le changement ne fit rien pour améliorer leur sort.  Avec leur fiche de 11-31-8 pour la saison, les Blueshirts passèrent de la première à la dernière place.
Buzinski s’enrôla à tour, puis retourna éventuellement en Saskatchewan.  Il joua avec Swift Current jusqu’en 1953, et travailla pour Agriculture Canada.  Il est décédé en 1992, à l’âge de 74 ans.
Sources : "Doug Bentley Nets Three For ‘Hawks", Canadian Press, 20 novembre 1942, The Calgary Herald, p.19, "Richard After No. 325 in Tonight’s Encounter", CP, 1er novembre 1952, The Calgary Herald, p.26, legendsofhockey.net, wikipedia.org.

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