vendredi 5 janvier 2018

De pads de cuir à aujourd'hui








Dernièrement, j'ai fait l'acquisition d'un duo bloqueur/mitaine Cooper GM12 datant des années '70. Probablement pour garnir sa "man-cave" lorsque ses garçons auront fini des les utiliser pour le hockey de rue, KeithActon me les a rachetés (sans que je fasse le moindre profit ; entre puckeux, on peut bien s'entraider ;) )

Les gants qui font maintenant partie de la collection de KeithActon

Cet achat m'a tout de même permis de les comparer à mes gants que j'utilise présentement (des Reebok P4 14K). Malgré plusieurs améliorations, les gants de gardiens sont restés tout de même assez semblables (sauf peut-être la mitaine qui ressemblait à un gant de joueur de 1er but au baseball). Je n'avais pas de jambières d'époque pour comparer, mais à partir de la fin des années 1980, elles ont considérablement changées.

Un bel exemple de la déformation des anciennes jambières
Jusque là, la norme était des jambières de marque soit Kenesky, Cooper ou Jofa. Elles étaient fait de cuir, rembourré essentiellement avec du crin de cheval, du cotton et du kapok, une fibre utilisé pour le rembourrage de meubles. Malgré toutes les belles intentions des manufacturiers de jambières, elles se déformaient avec le temps, absorbaient énormément d'eau de la patinoire et devenait de plus en plus lourde à mesure que le match avançait. Les moyens monétaires n'étant pas ce qu'ils sont non plus aujourd'hui, aucun gardien ne pouvait se permettre d'avoir une paire de jambières sèche qui l'attendait dans le vestiaire pour la période suivante !

Est apparu vers la fin des années 80 un prototype de jambières fait de matériaux synthétique, développé par Jim Lowson, sous le nom "Winlite". Ces jambières étaient beaucoup plus légères et imperméables. En plus, elles offraient une meilleure protection aux jambes, donnant l'impression que la jambe était encastrée dans la jambière (communément appelé "leg channel"). Également, exit les courroies en cuir et les attaches en métal (sauf sous le patin), les courroies étaient en tissus et les attaches en plastique. Plusieurs gardiens de la LNH les essayèrent, mais peu décidèrent de les conserver pour des matchs. Malgré tout, Greg Millen enfila les "Winlite" lors de son séjour à St-Louis. Réjean Lemelin, alors à Calgary, estimait d'ailleurs que c'est l'apparition de ces jambières qui avait sauvée sa carrière. Souffrant de maux de dos chroniques, ces nouvelles jambières, ne pesant que le tiers des jambières contemporaines, lui ont permis de donner un second souffle à sa carrière, devenant un excellent 2e gardien avec les Bruins de Boston. Lemelin a pris sa retraite suite à la saison 1992-93, lorsqu'il réalisa qu'il était peut-être rendu trop vieux, puisque un de ses coéquipiers lui a demandé la permission de cotoyer sa fille, Stephanie Lemelin.


Un extrait des dessins sur la demande de brevet de Lowson pour ses jambières



Lemelin en Winlite

Presqu'au même moment, Pete Smith avait lui aussi développé un prototype semblable, qu'il distribuait via "Aeroflex". Ces jambières étaient beaucoup plus populaire dans la ligue, portées par les Darren Puppa, Jacques Cloutier, Réjean Lemelin (suite à la disparition de "Winlite"), Greg Millen, Matt DelGuidice, Mark Laforest, etc. Cependant, aucun de ces gardiens n'était une vedette ou, à tout le moins, avait remporté une coupe Stanley tout en défendant le filet avec ces jambières. Le hockey étant très conservateur, les autres gardiens ne voyaient pas d'avantage à changer leur bonnes vieilles jambières.

Certains représentants de la famille Aeroflex


Lors de la saison 1990-1991, Tom Barrasso des Penguins de Pittsburgh, ancien coéquipier de Puppa et de Cloutier avec les Sabres, connaissait un début de saison ordinaire, avec une fiche de 4v - 7d - 1n. Il demanda donc à Pete Smith (maintenant chez Vic Hockey, ses "Aeroflex" ayant été rachetées par ces derniers) de lui confectionner des jambières afin de remplacer ses jambières conventionnelles. Grâce, entre autres, à ses nouvelles jambières, il aida les Penguins à remporter la coupe Stanley lors de deux saisons consécutives. La révolution était lancée !

Barrasso avec ces jambières Brown qu'il n'appréciait pas (à gauche) et avec ses jambières victorieuses (à droite)

Pete Smith a par la suite travaillé chez "Vaughn", où il a développé la ligne "Velocity". Depuis l'arrivée de ces jambières en 2000, toute la ligne d'équipement de gardien chez "Vaughn" est complétement synthétique. Suite à une mésentente avec les dirigeants de "Vaughn", il quitta pour développer et vendre ses jambières sous le nom de "Smith Hockey". Depuis 2011, il est désormais la tête dirigeante de la division gardien de but chez "Warrior Hockey"

La popularisation du style papillon par Patrick Roy apporta aussi son lot d'améliorations. Michel et Patrick Lefebvre ont commencé à fournir les jambières de Roy vers 1989 (sous la marque Lefebvre), avant de devenir fabriquant pour Koho (et par la suite Reebok et CCM). François Allaire (entraîneur de Roy des gardiens du Canadien) et Roy travaillait étroitement avec les Lefebvre afin d'améliorer les jambières et de les rendre "compatibles" avec le style de jeu de "Casseau". Cependant, jusqu'à la fin des années 1990, les jambières de Roy était encore fait à "l'ancienne méthode".

D'ailleurs, Michel Roy raconte un fait intéressant dans son livre "Le Guerrier". À l'été 1992, Robert Sauvé convainc Roy de s'associer avec l'équipementier "Koho". Il aurait ainsi un équipement bleu-blanc-rouge et, bien entendu, une rétribution monétaire. Jusqu'à lors, Roy portait un peu n'importe quoi comme équipement (par exemple, un bloqueur Ferland, une mitaine Brian's et les jambières Lefebvre). Cependant, Roy ne se plaisait pas dans ses nouvelles jambières et leurs nouvelles composantes. Après avoir subit la défaite à ses 5 dernières sorties de la saison 1992-93, Roy en eu assez. Il débarqua chez les Lefebvre avec comme mission de vider les jambières et de les rebâtir par l'intérieur. Après une nuit blanche, les Lefebvre livrèrent les jambières à Roy. Après les avoir essayé dans le hall, il leur lança : "Avec ça, je vais gagner la coupe Stanley". La suite fait parti de l'histoire !
 
C'est subtil, mais on remarque l'affaissement dans le bas des jambières modifiées de Roy lors des séries de 1993 VS les originales au match des étoiles

Plusieurs autres innovations sont rendues monnaie courante dans le monde des jambières. Le "knee pad" (pièce qui sert de coussin entre le genou et la glace lorsque le gardien est en position papillon) est apparu au milieu des années 1990, la façon d'attacher les patins aux jambières ne cessent d'évoluer, les "straps" en cuir ont de moins en moins la cote, remplacé par des bandes élastiques et velcro, etc.. 

Aujourd'hui, commander des jambières "non-stock" est pratiquement devenu un art, tellement il y a des options, afin de maximiser la performance d'un gardien selon ses habilités, que ce soit au niveau compétitif élevé ou même de "beer league".

Sources :
- http://www.chicagotribune.com/sports/hockey/blackhawks/ct-hockey-goalies-gear-through-the-ages-20150614-htmlstory.html
- http://modsquadhockey.com/forums/index.php?/topic/61565-warrior-ritual-full-set-ltr-the-ritual-calling-of-a-goaltender/
-        http://www.google.com.pg/patents/US4868926
-        http://ingoalmag.com/interviews/ask-a-pro-with-warriors-pete-smith/
-        https://warriorhockey.com/2016/09/30/30-years-of-innovation/
-        https://warriorhockey.com/2015/10/23/a-new-goalie-product-manager-joins-warrior-hockey/
-        https://goalie.purehockey.com/support/lefevre_factory_tour/pg_id/7003/
-        http://ingoalmag.com/news/ask-a-pro-michel-and-patrick-lefebvre/
-        http://hockeygoalies.org/bio/barrasso.html
-      Roy, M. (2007) La coupe de la reconnaissance, Le Guerrier (p.335-3360), Montréal, Libre Expression

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire