Est-ce que vous aimez ça les histoires d'équipes défuntes obscures de ligues tout aussi défuntes et obscures? Moi oui. Vous connaissez les t-shirts "I ♥ NY" ? Et bien moi j'aimerais bien avoir un chandail I ♥ OBSCURE DEFUNCT TEAMS...
Les «Border City Bandits» furent créés en l'an 2000 comme équipe d'expansion dans la deuxième incarnation de la Central Hockey League (CHL), ligue qui exista de 1992 à 2014 avec principalement des équipes du sud des États-Unis comme les Oilers de Tulsa, le Freeze de Dallas et le Thunder de Wichita.
Mais «Border City» n'est pas réellement une ville sous ce nom. Préparez-vous ici à une autre belle leçon de géographie. Le nom de la ville est plutôt Texarkana, une ville faisant partie d'un «tri-state area» nommé Ark-La-Tex, où les trois états voisins du Texas, la Louisiane et l'Arkansas se rejoignent. Et comme son nom l'indique, Texarkana est aussi un nom amalgame représentant les deux états où se trouve cette ville, le Texas et l'Arkansas. En fait il s'agit de deux villes jumelles du même nom (Texarkana, Texas et Texarkana, Arkansas) qui se retrouvent séparées par la frontière Texas/Arkansas. C'est en fait pareil à la situation présente à Kansas City (frontière du Missouri et du Kansas). Au total, l'agglomération des deux Texarkana en fait une ville d'environ 150 000 habitants.
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Bon maintenant que c'est réglé côté géographie, revenons aux Bandits de Border City. Même que selon ce que j'ai lu, il n'y a même pas tant de gens qui emploient ce terme de «Border City» dans ce coin de pays... Mais c'était quand même approprié pour l'équipe puisque leurs bureaux administratifs étaient du côté texan tandis que leur aréna était du côté arkansian? de l'Arkansas.
L'histoire se situe donc au tournant du millénaire et à la même époque, on avait sans doute surestimé la popularité des Stars de Dallas puisqu'on retrouvait alors au Texas une douzaine d'équipes mineures de hockey dans tout l'état à travers les différentes ligues de l'époque. Par exemple, on retrouvait au même moment des équipes comme les Wizards de Waco (WPHL), les Aeros de Houston (IHL) et les Iguanas de San Antonio (CHL) pour ne nommer que celles-là.
L'équipe démarra ses opérations pour la saison 2000-2001 mais même avant leur premier match, il y avait un gros «red flag» chez les Bandits en la personne de John Barath, leur propriétaire. Originaire d'Edmonton, Barath s'était précédemment attiré des problèmes et des ennemis dans le monde du hockey professionnel lorsqu'il se retira des actionnaires d'une équipe du nom des Gila Monsters de Tucson dans la West Coast Hockey League, quelques jours avant leur premier match d'existence en 1997. Le reste du groupe tenta de survivre sans l'apport financier de Barath mais l'équipe déclara faillite au milieu de sa première saison. Les Gila Monsters parvinrent à terminer la saison malgré tout, mais disparurent pour de bon après 21 matchs au début de la saison suivante. Un de ces actionnaires, Stephen Mendel, était aussi originaire d'Edmonton et deviendra même maire de la ville de 2004 à 2013 en plus d'être ministre de la santé de l'Alberta pendant quelques années.
Bref les Gila Monsters furent un flop et malgré cet affront commis dans la WCHL, John Barath fut quand même accepté comme nouveau propriétaire dans la CHL.
S'en suivit une comédie d'erreurs digne de ce qu'on s'attend d'une équipe boboche du sud profond. Tout d'abord, les Bandits avaient comme aréna le «Four States Fairgrounds», une grange de rodéo convertie en aréna où il était apparemment commun d'y voir des fuites dans le toit couler sur la glace.
Ensuite, les Bandits devinrent la risée de la région lorsqu'ils firent la signature de leur premier joueur, l'ancien choix du Canadien Keli Corpse. Plusieurs pensaient (avec raison) que selon ce titre dans le journal local, le premier joueur des Border City Bandits était mort...
Source: Hockey Logos Org (Instagram) |
Les Bandits débutèrent donc leurs activités le 14 octobre 2000 et remportèrent leur premier match 5-2 contre les Scarecrows de Topeka. En plus de Keli Corpse, les Bandits avaient dans leurs rangs nul autre que celui que je considère être le recordman pour le nombre d'équipes à vie, l'éternel nomade Trevor Jobe. On retrouvait aussi le montréalais Daniel Shank, le seul membre des Bandits à avoir joué dans la LNH. Il y avait également chez les Bandits un gardien québécois du nom de Jean-Ian Filiatrault, qui détient le record de cette défunte CHL avec un total de 60 arrêts (sur 61 tirs) lors d'un match contre les Iguanas de San Antonio.
Après un début de saison respectable de 5-3-2 en 10 matchs et quelques matchs dans la moyenne d'assistance respectable de 4000 spectateurs, les choses débandèrent rapidement par la suite. Les Bandits perdirent 22 des 24 matchs suivants, les assistances tombèrent sous les 2000 et les joueurs commençaient à voir leurs chèques rebondir.
Et ce qui était probablement prévisible dès le départ pour les Bandits, leur propriétaire était rarement aperçu à Texarkana et devint finalement introuvable. La CHL, après avoir accumulé plus de 80 000$ de frais impayés par Garath, décida de dissoudre la franchise le 20 février 2001. Il s'agissait de la première fois qu'une équipe de la CHL ne put compléter une saison. La fiche finale des très éphémères Bandits de Border City fut donc de 11 victoires, 36 défaites et 4 matchs nuls en 51 matchs (d'un calendrier de 70 matchs). Les joueurs des Bandits furent dispatchés à travers la CHL ou migrèrent vers d'autres ligues pour terminer la saison. Daniel Shank quitta d'ailleurs pour les Gulls de San Diego dans la WCHL et il y remporta le championnat.
La saison suivante, une équipe senior de la Golf Coast Hockey League du nom des Bandits de Texarkana évolua l'espace d'une saison dans le même rodéo aréna que leurs ancêtres de la CHL. Ensuite ce fut une autre équipe, junior cette fois-ci, qui emprunta le nom des Bandits de Texarkana dans la North American Hockey League de 2003 à 2006. Aucun club n'y a évolué depuis.
Ma théorie du complot c'est que le puissant lobby du rodéo texan a trop d'emprise sur l'économie locale du Texas et de l'Arkansas...
Sources:
Hockey Logos Org
Fun while it Lasted
Hockey in Tucson - Gila Monsters, Scorch put Tucson in pro sports tailspin, Tucson.com, 19 août 2016
Jean-Ian, pour vrai?
RépondreSupprimerVérification faite, le gentilé des gens (et des choses) de l'Arkansas est « arkansasais »...
RépondreSupprimerKeli Corpse : en français, ça donnerait "Machabée" !
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