Voici un texte que je prépare dans ma tête depuis un bon moment et le timing semble approprié car après 11 ans d’absence, les Oilers d'Edmonton sont finalement de retour en séries … Si ces 11 dernières années ont été très dures pour les partisans des Oilers, ce n'est toutefois pas la première fois qu'ils voient leur équipe revenir de loin. Après Montréal, Edmonton est l'équipe dont je suis le plus les activités. J'ai toujours été fasciné par le mouvement de personnel à Edmonton, un petit marché peu convoité où il a toujours été difficile d'attirer des joueurs et de les garder.
J'ai donc décidé de consacrer un article à une époque de l'histoire de cette franchise qui me fascine particulièrement, soit les années déprimantes de lendemain de veille post-dynastie. Des années ponctuées de plusieurs départs douloureux pour les fans des Oilers qui furent bafoués par plusieurs échanges douteux de la part de Glen Sather qui lui fut frappé en pleine face par la nouvelle réalité économique du hockey dans le petit marché qu'est Edmonton.
Difficile de commencer cette histoire à
un autre moment que celui de l'échange de Wayne Gretzky durant l'été
1988. Peu importe les motifs de son départ et les manigances en
coulisse, l'échange de la merveille a changé le visage de la LNH
tant au plan sportif qu'au plan des affaires. Après "l'échange",
Gretzky renégocia son contrat à Los Angeles et obtint plus de 3
millions par année de la part des Kings, une sommet astronomique à
l'époque et il était bien sûr le mieux payé de la ligue. Cette
signature de contrat eut un effet domino à travers la ligue. Mario
Lemieux demanda de renégocier son contrat avec les Penguins et
obtint 2.25 millions par année. Plus tard, l'agent de Brett Hull,
estimait que la production offensive de son client s'approchait de
celle de Gretzky et qu'il méritait un salaire à la Gretzky. Il
obtint 7 millions pour 4 ans.
En 1989, soit un an après l'échange,
l'association des joueurs obtint de la ligue que les contrats soit
rendus publics, ce qui accéléra davantage l'escalade des salaires
dans les années à venir et nulle part ailleurs qu'à Edmonton l'on
ressentit les effets de cette révolution. L'équipe était
toujours très compétitive malgré le départ de Gretzky mais après
l'ultime conquête des Oilers au printemps 1990, les choses
commencèrent à dérailler rapidement. Le capitaine Mark Messier,
qui était sous contrat jusqu'en 1993, tentait lui aussi de
renégocier son contrat pour s'approcher de 2 millions annuellement.
Jari Kurri reçut une nouvelle offre insatisfaisante de la part de
l'équipe et opta de ne pas se présenter au camp d'entrainement
et décida de jouer en Italie pour la saison 1990-91. Glenn Anderson
refusa également de se rapporter au camp mais revint finalement sur
sa décision au début de la saison alors que son contrat était
encore valide pour 2 ans. Malgré tout, les Oilers de 1990-91 se
rendirent quand même en finale de conférence, éliminant au passage
les Kings de Gretzky.
1990 - Messier, Lowe et Kurri |
C'est durant l'été 1991 que débuta l'exode de masse d'Edmonton. Le premier à partir fut Kurri qui fut échangé tout d'abord à Philadelphie et ensuite dans un autre échange à Los Angeles où il retrouva Gretzky. Par la suite, lors de la Coupe Canada présentée à la fin du mois d'août, on retrouvait dans les journaux d'Edmonton davantage de rumeurs d'échange que les résultats des matchs du tournoi. On parlait de plus en plus du démantèlement inévitable du noyau restant de la dynastie.
L'élément déclencheur de cette exode
arriva lorsque l'attaquant Adam Graves reçut une offre de contrat
des Rangers que Sather refusa d'égaler. Messier fut furieux lorsqu'il apprit cette
nouvelle et demanda publiquement d'être échangé en déclarant qu'il ne se
présenterait pas au camp, estimant que les Oilers n'étaient pas
prêts à payer le prix pour demeurer compétitifs. À la défense de
Sather, Graves n'avait jamais marqué plus de 9 buts en une saison à
ce moment de sa carrière et Sather affirma plus tard qu'il aurait
agi différemment s'il avait su que Graves allait devenir un marqueur
de 50 buts à New York.
Après la Coupe Canada, le camp
d'entrainement des Oilers débuta avec plusieurs absents dans la
chambre. Outre Messier, Esa Tikkanen resta en Finlande suite à une
impasse dans sa renégociation de contrat. Idem pour Anderson et
Craig Simpson qui ne se présentèrent pas au camp en espérant une
augmentation de salaire. Peu après le début du camp, les Oilers se
départirent d'Anderson et du gardien Grant Fuhr dans un échange
avec les Maple Leafs. Fuhr était également sur du temps emprunté à
Edmonton alors qu'il fut suspendu 60 matchs la saison précédente
pour possession de cocaïne. Le défenseur Steve Smith, aussi
insatisfait de son contrat, fut échangé à Chicago en retour de
Dave Manson. Glen Sather déclara que beaucoup de ces joueurs se
voyaient soudainement comme des joueurs à 1 million de dollars par
année, ce qu'ils n'étaient pas selon lui.
Après un match au début de la saison,
les enchères pour Mark Messier arrivèrent à une conclusion alors
qu'il fut échangé aux Rangers. Il obtint un nouveau contrat de 2.6
millions annuellement chez les Rangers.
Durant la dynastie des Oilers, 7
joueurs ont participé aux 5 conquêtes de l'équipe; Messier, Kurri,
Anderson, Fuhr, Kevin Lowe, Randy Gregg et Charlie Huddy. Gregg et
Huddy furent respectivement libéré et laissé sans protection au
repêchage d'expansion de 1991, ce qui fait qu'au début de la saison
1991-92, il ne restait que Lowe en place parmi le club des 7. Il fut
nommé comme capitaine successeur à Messier. Simpson et Tikkanen
revinrent finalement avec l'équipe alors que le propriétaire Peter Pocklington commença à
desserrer un peu son portefeuille, mais ce ne fut que temporaire. Le
gardien Bill Ranford joua la saison entière en renégociation de
contrat et obtint finalement le contrat désiré après la saison.
Au travers de tous ces départs, les
Oilers demeurèrent quand même compétitifs et avaient toujours un
noyau de vétérans potables et un certain leadership en Tikkanen,
Lowe, Simpson, Ranford et compagnie. Ils se rendirent de nouveau en
finale de conférence lors des séries de 1992, éliminant de nouveau
les Kings de Gretzky sur leur route. Les Kings avaient à ce moment
plusieurs ex-Oilers en plus de Gretzky (Kurri, Huddy, Paul Coffey et
Marty McSorley).
Malgré cette recette toujours gagnante chez les Oilers, ils commençaient toutefois à perdre du galon alors qu'ils ne firent que passer en finale de conférence où ils furent balayés en 4 matchs par les Blackhawks. L'atmosphère était également devenue toxique à Edmonton. Les partisans se sentaient toujours trahis par l'échange de Gretzky et le départs des autres vedettes lors des années suivantes ne firent qu'empirer les choses. Les assistances diminuèrent donc drastiquement, même lors des matchs en séries, et les nouveaux joueurs obtenus par l'équipe lors de leur liquidation de la dynastie ne firent que passer pour la plupart car Sather prit plusieurs décisions subséquentes que je trouve totalement absurdes.
Malgré cette recette toujours gagnante chez les Oilers, ils commençaient toutefois à perdre du galon alors qu'ils ne firent que passer en finale de conférence où ils furent balayés en 4 matchs par les Blackhawks. L'atmosphère était également devenue toxique à Edmonton. Les partisans se sentaient toujours trahis par l'échange de Gretzky et le départs des autres vedettes lors des années suivantes ne firent qu'empirer les choses. Les assistances diminuèrent donc drastiquement, même lors des matchs en séries, et les nouveaux joueurs obtenus par l'équipe lors de leur liquidation de la dynastie ne firent que passer pour la plupart car Sather prit plusieurs décisions subséquentes que je trouve totalement absurdes.
Je peux tout d'abord comprendre le contexte qui l'a
poussé à se départir de plusieurs vedettes comme Messier, Kurri,
Anderson, Fuhr et cie. Et dans la plupart des cas, il a quand même
réussi à obtenir quelques joueurs potables en retour. Mais ce qui
me bafoue totalement, ce sont les échanges subséquents. Je
m'explique:
J'ai pensé analyser ces échanges sous
deux niveaux. Le 1er niveau est l'échange principal, soit le
premier échange des joueurs vedettes tandis que le 2e niveau
implique les échanges subséquents. Vous connaissez l'expression 4
trente-sous pour 1 piastre? Et bien ici on dirait que les Oilers ont
appliqué cette règle (1er niveau) mais après avoir reçu leurs 4
trente-sous, ils les ont ré-échangé pour 75 cents (2e niveau). Et
le taux de change était mauvais à ce moment-là. Je me concentre
ici sur les échanges suivant la saison 1990-91, moment où l'hécatombe débuta.
Échange #1 (30 mai 1991)
EDMONTON | PHILADELPHIE |
Scott Mellanby | Jari Kurri (échangé ensuite à L.A) |
Craig Fisher | Dave Brown |
Craig Berube | Corey Foster |
1er niveau:
Échange quand même correct. Le départ
de Kurri semblait inévitable et il ne dépassera le plateau des 30
buts qu'une seule autre fois après son départ. Il n'était plus
qu'un spécialiste défensif lors de sa retraite en 1998. Les autres
joueurs obtenus par les Flyers n'étaient que des figurants. Même
chose pour Fisher et Berube qui ne firent que passer.
2e niveau:
La pièce maîtresse obtenue en retour de
Kurri fut Scott Mellanby qui devint éventuellement un marqueur de 30 buts en Floride
et qui jouera jusqu'en 2007. Sather l'a tout bêtement perdu au
repêchage d'expansion de 1993, lui préférant des joueurs comme Vladimir Vujtek (on le verra plus loin lui). Comme consolation en retour du départ
de la légende Finlandaise, c'est très mince...
Échange #2 (19 septembre 1991)
EDMONTON | TORONTO |
Vincent Damphousse | Glenn Anderson |
Peter Ing | Grant Fuhr |
Luke Richardson | Craig Berube |
Scott Thornton | |
Considérations futures | |
Cash |
1er niveau:
Un blockbuster ici alors que 2 grosses
pièces de la dynastie s'en allèrent à Toronto. Craig Berube aura
donc fait partie de 2 gros échanges durant l'année 1991 sans jamais
enfiler l'uniforme des Oilers. Je considère toutefois que les Oilers
eurent le dessus dans cet échange alors que Vincent Damphousse était à ce
moment-là supérieur à Anderson tandis que Fuhr n'était plus
désiré. Ils eurent également quelques joueurs d'utilité qui
joueront quelques saisons à Edmonton en Thornton et Richardson.
2e niveau:
Damphousse fut le meilleur joueur des
Oilers en 1991-92 et Sather déclara même qu'il était le meilleur
attaquant québécois après Mario Lemieux, ce qui ne l'empêcha pas
de le ré-échanger un an plus tard à Montreal contre Shayne Corson,
Brent Gilchrist et Vladimir Vujtek. J'ai déjà analysé cet échange
totalement perdant des Oilers dans le passé (voir texte du 9 septembre 2015). Un autre retour sur l'investissement perdant ici.
Échange #3 (4 octobre 1991)
EDMONTON | NEW YORK RANGERS |
Bernie Nicholls | Mark Messier |
Louie DeBrusk | Considérations futures (Jeff Beukeboom) |
Steven Rice | |
Considérations futures (David Shaw) |
1er niveau:
Ici il est clair que les Oilers
seraient perdants de n'importe quel échange impliquant Messier, mais
comme les autres échanges, ce départ était devenu inévitable. Ils
perdirent éventuellement un autre gros morceau en Jeff Beukeboom.
Ils reçurent en retour un dur à cuire (DeBrusk) qui joua avec
l'équipe jusqu'en 1997 ainsi que d'autres prospects qui n'aboutirent
pas à grand chose. La pièce maitresse de cet échange pour les
Oilers fut Bernie Nicholls qui ne joua que 49 matchs cette saison-là
mais qui récolta tout de même 1 point par match et qui avait encore
quelques bonnes saisons dans le corps. Il fut également le 2e
meilleur pointeur des Oilers en séries.
2e niveau:
Comme Damphousse avant lui, Nicholls
fut ré-échangé rapidement et les Oilers perdirent au change. En
janvier 1993, ils envoyèrent Nicholls au New Jersey en retour des
attaquants Zdeno Ciger et Kevin Todd. Ciger connut deux saisons
potables à Edmonton avant de retourner jouer en République Tchèque
en 1996. Todd semblait être un jeune prometteur quelques saisons
auparavant avec les Devils mais les Oilers ne furent qu'une de ses
nombreuses destinations lors de son parcours de nomade des années
subséquentes. Nicholls pour sa part joua jusqu'en 1998-99 tandis que
Messier remporta la coupe en 1994 avec les Rangers et joua jusqu'en
2004...
Glen Sather continua ensuite de
liquider le restant de ses ex-champions dans des échanges plus ou
moins rentables... Encore ici il ne s'agit que des échanges majeurs impliquant des joueurs de l'équipe de 1990,
d'autres joueurs mineurs s'en allèrent au travers de ça.
ÉCHANGE #4 (11 décembre 1992)
EDMONTON | NEW YORK RANGERS |
Roman Oksiuta | Kevin Lowe |
Choix de 3e en 1993 (Alexander Kerch) |
ÉCHANGE #5 (24 février 1993)
EDMONTON | CHICAGO |
Igor Kravchuk | Joe Murphy |
Dean McAmmond |
ÉCHANGE #6 (17 mars 1993)
EDMONTON | NEW YORK RANGERS |
Doug Weight | Esa Tikkanen |
ÉCHANGE #6 (16 juin 1993)
EDMONTON | TAMPA BAY |
Choix de 3e en 1994 (Brad Symes) | Petr Klima |
ÉCHANGE #7 (20 juin 1993)
EDMONTON | QUÉBEC |
Scott Pearson | Martin Gélinas |
Choix de 6e en 1993 (Nicholas Checco) |
ÉCHANGE #8 (1er septembre 1993)
EDMONTON | BUFFALO |
Jozef Cierny | Craig Simpson |
Choix de 4e en 1994 (Jussi Tarvainen) |
ÉCHANGE #9 (21 mars 1994)
EDMONTON | NEW YORK RANGERS |
Todd Marchant | Craig MacTavish |
Tous ces échanges et ce démantèlement
firent en sorte qu'au début de la saison écourtée de 1995, il ne
restait que 2 joueurs de l'édition championne de 1990, Kelly
Buchberger et le gardien Bill Ranford. Ironiquement, les meilleurs
échanges de Sather (Weight et Marchant) impliquèrent également les Rangers, qui
tentèrent de répliquer la formule des Oilers en s'accaparant
de leurs anciens joueurs. En plus de Messier, les Rangers de 1994
comptaient dans leurs rangs 6 autres anciens Oilers (Anderson,
MacTavish, Lowe, Beukeboom, Tikkanen et Graves). Plusieurs
considèrent que la coupe de 1994 des Rangers est en quelque sorte la
6e des Oilers... Si on considère que les Kings de 1993, finalistes
de la Coupe Stanley, avaient également plusieurs ex-Oilers dans
leurs rangs, il est à se demander combien de championnats
supplémentaires les Oilers auraient pu remporter. Wayne Gretzky a
lui-même estimé qu'il aurait pu remporter 3 ou 4 coupes
supplémentaires s'il était resté à Edmonton avec le même
noyau...
Pour leur part, Buchberger resta avec
l'équipe jusqu'en 1999 lorsqu'il fut réclamé au repêchage
d'expansion par les Thrashers d'Atlanta tandis que Ranford fut
échangé aux Bruins en janvier 1996. Il revint à Edmonton durant la
saison 1999-2000 comme agent libre, ce qui fit de lui à ce moment-là
le dernier membre survivant de la dynastie encore avec l'équipe.
Au moins Glen Sather commençait à
recevoir de meilleurs joueurs en retour et à recommencer à bien repêcher, chose qui faisait défaut durant les années de dynastie. Des joueurs comme Doug
Weight et Todd Marchant par exemple ainsi que des choix judicieux comme Jason Arnott et Ryan Smyth. Il réussit également à
obtenir les droits sur Curtis Joseph et Mike Grier lorsque les Blues
de St.Louis signèrent Shayne Corson comme agent libre avec
compensation en 1995. Il réussit même à refiler Dave Manson
(obtenu contre Steve Smith) aux Jets de Winnipeg contre l'excellent
défenseur Boris Mironov ainsi qu'un choix de 1re ronde (Jason
Bonsignore). Ces échanges permirent tranquillement aux Oilers de redevenir
respectables en 1997 lorsqu'ils revinrent en séries après 5 ans
d'absence. 5 ans d'absence c'est pas mal moins que les 11 dernières
années misérables des Oilers mais dans le contexte de
post-dynastie, je me demande si ces 5 années ne semblèrent pas plus
longues en réalité pour les fans... Quoique la plus récente
disette découla de la présence surprise en finale de 2006 et d'un
autre exode de joueurs par la suite (Chris Pronger). Pas facile
d'être partisan des Oilers...
Sather resta à Edmonton jusqu'en 2000.
Il quitta ensuite pour devenir DG des Rangers de New York, chose que
j'ai toujours trouvée ironique. Il pouvait désormais garocher des
millions à qui il lui plaisait. Des joueurs comme Bobby Holik, Scott
Gomez et Chris Drury lui disent encore merci d'ailleurs...
Sources:
Wikipedia
Hockeydb
Wikipedia
Hockeydb
Cooper and blue
1 commentaire:
Ne pas oublier l'échange de Paul Coffey quelques années auparavant. Signe avant-coureur des ventes de feu ultérieures.
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