En regardant les six principales ligues professionnelles d’Amérique du Nord (MLB, NFL, LCF, LNH, NBA et MLS), on constate que parmi la multitude de trophées, prix et récompenses, ceux-ci portent habituellement un nom descriptif (joueur le plus utile, entraîneur de l’année, etc.), le nom d’un commanditaire ou le nom d’un ancien joueur, propriétaire ou dirigeant. Comme on parle ici de personnes s’étant illustrées dans le passé (bien qu’honnêtement, les choses ont peu changé depuis et celles du présent sont semblables), il s’agit exclusivement d’hommes.
Parmi tous ceux-ci, il y a par contre une notable exception. Le trophée de la LNH soulignant le joueur avec le meilleur esprit sportif est le Lady Byng. En cette journée internationale de la femme, nous lui consacrons donc ce billet.
(Évidemment, en incluant une ligue féminine comme la WNBA, on en ajouterait quelques-unes, bien que la plupart des trophées y portent un nom descriptif, tout comme tous les trophées de la NWSL (National Women Soccer League). De plus, rappelons-nous que les championnes de la défunte LCHF (Ligue canadienne de hockey féminin) recevaient la Coupe Clarkson. Celle-ci est nommé ainsi parce qu’elle a été donnée par l’ancienne gouverneure générale Adrienne Clarkson. Elle suivait alors la tradition instaurée par d’autres gouverneurs généraux, Lord Stanley, Lord Grey et Georges Vanier entre autres.)
Née à Londres, Evelyn Moreton était la fille de Sir Richard Moreton, le maître de cérémonie de la reine Victoria.
C’est en 1902 qu’elle épousa le colonel Julian Byng, membre d’une famille noble qui avait combattu lors de la guerre des Boers, en Afrique du Sud. Le couple vécut ensuite aux Indes, alors une colonie britannique où fut posté le colonel, puis en Égypte.
Incapable de mener à terme ses grossesses, madame se consacra à l’écriture. C’est d’ailleurs en 1913 que fut publié son roman ayant été son plus grand succès, Anne of the Marshes.
L’année suivante, la Première guerre mondiale éclata et le colonel fut impliqué en territoire français. Le fait marquant de sa carrière militaire eut d’ailleurs lieu en France, alors que ses troupes remportèrent l’emblématique bataille de la crête de Vimy, victoire d’une importance historique pour les troupes canadiennes, qui s’y sont démarqué.
Suite au conflit, le colonel fut nommé baron de Vimy et de Thorpe-le-Soken en 1919. Deux ans plus tard, le roi George V le nomma gouverneur-général du Canada.
À leur arrivée à Ottawa, le couple fit connaissance avec le sport du hockey et assistèrent à de nombreux matchs des Senators. Toutefois, le jeu était à l’époque pour le moins robuste, pour ne pas dire salaud. Lady Byng écrivit donc en mars 1925 au président de la Ligue nationale, Frank Calder, pour lui proposer qu’elle fasse don d’un trophée remis au joueur le plus gentilhomme et ayant le meilleur esprit sportif. Pour elle, ce deuxième trophée (à l’époque, la LNH n’avait que le trophée Hart) allait aider à nettoyer le sport de sa violence.
Lady Byng invita alors la vedette des Senators, Frank Nighbor, à Rideau Hall pour lui montrer le trophée. Elle lui demanda alors s’il pensait que la ligue lui permettrait de l’offrir. Lorsqu’il lui répondit que oui, elle lui annonça, à la grande surprise de Nighbor, qu’il en était le premier récipiendaire. C’est elle-même qui l’a choisi. Par la suite, comme pour le trophée Hart, ce fut un comité de chroniqueurs sportifs qui prit la relève.
Le mandat de Lord Byng prit fin en 1926, mais auparavant, il marqua l’histoire du poste de gouverneur général. À l’élection fédérale d’octobre 1925, les libéraux du premier ministre sortant Mackenzie King obtinrent 101 sièges, moins que les 116 du Parti conservateur. Toutefois, malgré la suggestion de Byng, King refusa de démissionner, estimant qu’il parviendrait à gouverner à l’aide des 22 députés progressistes. Byng lui indiqua donc qu’en cas où il perdrait la confiance de la chambre, le chef conservateur Arthur Meighen devrait avoir l’occasion de former un gouvernement, plutôt que de retourner en élection.
En juin 1926, suite à un scandale de corruption relié aux douanes, King perdit l’appui des progressistes. Voulant éviter de perdre un vote de confiance, King demanda à Byng de dissoudre le parlement et de déclencher des élections. Pour la seule fois dans l’histoire, le gouverneur général refusa la demande du premier ministre. King démissionna et Meighen fut nommé premier ministre. Toutefois, son gouvernement fut défait en septembre. Aux élections qui s’en suivirent, Mackenzie King remporta une majorité, ce qui mit fin à ce qu’on appela l’affaire King-Byng.
Les Byng retournèrent alors en Grande-Bretagne, mais le trophée Lady Byng demeura. En 1935, Frank Boucher, des Rangers mais originaire d’Ottawa, le remporta pour une septième fois en huit ans. Celle qui, suite à l’élévation de son mari au titre de vicomte était maintenant vicomtesse, décida de lui donner le trophée et le remplaça par un autre. Boucher demanda alors de ne plus être considéré pour celui-ci, pour laisser l’occasion aux autres de le remporter. (Le trophée original fut plus tard détruit lors de l’incendie du domicile de Boucher.)
Au moment du déclenchement des hostilités de la Deuxième guerre mondiale, on conseilla à Lady Byng de trouver refuge au Canada. Celle qui avait profité de son passage à Rideau Hall pour amasser une imposante collection de fleurs sauvages canadiennes œuvra alors au sein de différentes organisations caritatives d’Ottawa jusqu’à son retour en Grande-Bretagne, en 1945.
À son décès, en 1949, la ligue fit don d’un troisième trophée, le Lady Byng Memorial Trophy.
Au fil des années, seulement Wayne Gretzky s’est approché des sept titres de Frank Boucher, avec cinq.
Depuis le début, seulement trois défenseurs l’ont remporté : Bill Quackenbush, Red Kelly et Brian Campbell, les autres étant tous des attaquants.
Sources : "Viscountess Byng of Vimy Passes In England at Age 78", CP, June 22, 1949, Ottawa Citizen, page 29,
thecanadianencyclopedia.ca, wikipedia.org.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire