vendredi 6 juin 2025
Dave Elenbaas
mercredi 4 juin 2025
Les buts de Jean Béliveau
Je viens de terminer la biographie de Jean Béliveau, «Ma vie bleu-blanc-rouge» il y a quelques jours. Je sais ça fait plusieurs années que c'est sorti et même mis à jour avec une deuxième édition mais je n'avais jamais eu la chance avant de me le procurer l'autre jour dans une biblio-vente.
J'aime bien aussi qu'il insiste sur la «dynastie oubliée» des Canadiens, soit celle de 1965 à 1971 où le club gagna 5 coupes en 7 ans, qu'il considère injuste qu'elle ne soit pas davantage reconnue, étant prise en sandwich entre la dynastie des 5 coupes de 1956 à 1960 et celle de 1976 à 1979.
Il est vrai que le club était dominant durant cette période mais j'hésiterais à le considérer comme étant une dynastie, puisque le club rata les séries en 1970 au tout dernier match de la saison dans des circonstances bizarres, en plus d'avoir remporté 2 des ces coupes contre les Blues de St.Louis, un club se retrouvant en finale simplement parce que toutes les équipes d'expansion étaient dans la même conférence... De plus, cette «dynastie» a été grandement entachée par la coupe perdue de 1967 aux mains des Leafs lors de l'année de l'exposition universelle où le club s'était promis de présenter la coupe. D'ailleurs, Béliveau effleure à peine le sujet de cette finale de 1967, même chose pour les séries ratées de 1970.
Donc bref, un bon livre. Le gros Bill est tellement attachant, même de l'au-delà. Mais la meilleure anecdote qui m'est sortie de cette lecture est la suivante que je vous recopie ici:
L'organisation du Canadien avait cru bon de se procurer une police d'assurance, car je venais de signer avec eux un contrat de 100 000$ pour une durée de cinq ans... On me fit passer un examen médical très poussé et les médecins relevèrent ce qu'ils ont qualifié «d'anomalie cardiaque»... Au grand désespoir de Frank Selke, la compagnie d'assurances refusa de m'offrir une garantie. Le médecin qui m'avait examiné avait écrit dans son rapport: «Il présente un moteur d'Austin dans un châssis de Cadillac».Persone ne crut que ma vie était en danger, mais cela me posait quand même de sérieux problèmes. Lorsque je devais fournir un effort important, mon coeur ne parvenait pas à pomper assez de sang pour bien oxygéner mon organisme. Les principaux symptômes étaient la fatique, des nausées, une perte temporaire de la vue, des difficultés respiratoires et des douleurs si aigües à la poitrine que j'avais l'impression que mon coeur allait éclater.
Un autre que moi aurait peut-être tout laissé tomber... Mais je suis resté, et j'ai bien fait. J'ai aidé le Canadien à gagner cinq coupes Stanley consécutives.
Après la saison 1961-62, la nature a commencé à me rattraper. J'étais toujours fatigué. J'ai donc décidé d'aller à la clinique Leahy à Boston, où j'ai passé tous les tests d'effort inimaginables... les deux premières minutes sur le tapis roulant étaient très éprouvantes et je manquais rapidement de souffle. Peu à peu, ma réponse musculaire s'améliorait, mon corps s'adaptait et au bout de six minutes, quand on me fit signe d'arrêter, ma «machine» s'était vraiment mise en marche et j'aurais pu continuer pendant plusieurs minutes encore.
Les médecins étaient très étonnés que je puisse faire carrière dans le sport professionnel... Ils en ont cependant déduit que je ne risquais rien si je continuais... Apparemment, mon corps s'était habitué à cet état depuis plusieurs années et s'était imposé un rythme qui, comme l'avaient démontré les tests, s'accélérait avec l'effort. Autrement dit, j'étais lent à démarrer, mais une fois lancé, mon «moteur» fonctionnait de mieux en mieux.
Je n'ai pas vérifié mes statistiques au cours des années, mais il se pourrait bien que j'aie compté plus de buts dans la deuxième et la troisième période que dans la première.
C'est bien sûr cette dernière citation qui a piqué ma curiosité. Si le regretté monsieur Béliveau n'a pas pu vérifier cette hypothèse, ni aucune autre personne d'ailleurs selon mes recherches, je me devais de lui rendre hommage et vérifier.
Voici les buts marqués de Jean Béliveau au cours de sa longue carrière, décortiqués par périodes:
Saison Régulière | Matchs | 1ère | 2ème | 3ème | Total |
1950-51 | 2 | 1 | 0 | 0 | 1 |
1952-53 | 3 | 1 | 4 | 0 | 5 |
1953-54 | 44 | 6 | 3 | 4 | 13 |
1954-55 | 70 | 10 | 17 | 10 | 37 |
1955-56 | 70 | 12 | 15 | 20 | 47 |
1956-57 | 69 | 11 | 9 | 13 | 33 |
1957-58 | 55 | 4 | 11 | 12 | 27 |
1958-59 | 64 | 19 | 13 | 13 | 45 |
1959-60 | 60 | 12 | 6 | 16 | 34 |
1960-61 | 69 | 14 | 7 | 11 | 32 |
1961-62 | 43 | 8 | 6 | 4 | 18 |
1962-63 | 69 | 4 | 8 | 6 | 18 |
1963-64 | 68 | 12 | 9 | 7 | 28 |
1964-65 | 58 | 7 | 9 | 4 | 20 |
1965-66 | 67 | 9 | 12 | 8 | 29 |
1966-67 | 53 | 2 | 3 | 7 | 12 |
1967-68 | 59 | 9 | 14 | 8 | 31 |
1968-69 | 69 | 11 | 14 | 8 | 33 |
1969-70 | 63 | 11 | 3 | 5 | 19 |
1970-71 | 70 | 11 | 5 | 9 | 25 |
TOTAL | 1125 | 174 | 168 | 165 | 507 |
Donc voilà. Vous voyez en jaune les instances où Jean Béliveau a marqué plus de buts qu'en première période. Loin de moi l'idée de contredire M. Béliveau et j'aurais vraiment voulu que cette théorie se confirme pour ajouter au folklore, mais ce n'est malheureusement pas le cas. Il a en fait marqué davantage de buts en première période (174), quoique seulement par une mince différence.
Il y a bien sûr quelques saisons où ce fut le cas, particulièrement celles de 1957-58 et sa meilleure saison en carrière de 1955-56 où c'est vraiment une récolte exponentielle de période en période. Mais sur une possibilité de 40 périodes (2 périodes x 20 saisons), il y a seulement 16 instances positives.
Mais ici ce ne sont que les buts marqués en saison régulière. Allons voir dans les séries, là où ça compte vraiment.
Séries | Matchs | 1ère | 2ème | 3ème | OT | Total |
1950-51 | / | / | / | / | / | / |
1952-53 | / | / | / | / | / | / |
1953-54 | 10 | 0 | 1 | 1 | 0 | 2 |
1954-55 | 12 | 2 | 3 | 1 | 0 | 6 |
1955-56 | 10 | 3 | 5 | 4 | 0 | 12 |
1956-57 | 10 | 1 | 3 | 2 | 0 | 6 |
1957-58 | 10 | 1 | 2 | 0 | 0 | 3 |
1958-59 | 3 | 0 | 1 | 0 | 0 | 1 |
1959-60 | 8 | 4 | 0 | 1 | 0 | 5 |
1960-61 | 6 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
1961-62 | 6 | 0 | 1 | 2 | 0 | 3 |
1962-63 | 5 | 1 | 1 | 0 | 0 | 2 |
1963-64 | 5 | 0 | 2 | 0 | 0 | 2 |
1964-65 | 13 | 3 | 3 | 2 | 0 | 8 |
1965-66 | 10 | 2 | 1 | 2 | 0 | 5 |
1966-67 | 10 | 3 | 2 | 1 | 0 | 6 |
1967-68 | 10 | 5 | 0 | 2 | 0 | 7 |
1968-69 | 14 | 0 | 2 | 2 | 1 | 5 |
1969-70 | / | / | / | / | / | / |
1970-71 | 20 | 2 | 1 | 3 | 0 | 6 |
TOTAL | 162 | 27 | 28 | 23 | 1 | 79 |
J'espérais donc vraiment que les séries allaient venir contre-carrer mon argumentation jusqu'à date mais malheureusement, c'est la même chose, quoique on retrouve 1 seul but différentiel au total en 2e période, ce qui ne vient pas vraiment confirmer grand chose, encore une fois c'est pas mal égal quelque soit la période, en saison ou en séries. Ici, sur 34 périodes possibles, c'est arrivé 14 fois, plus 1 seul but marqué en prolongation.
Mais on remarque également que les quelque fois où c'était le cas, c'était encore durant ses saisons en début de carrière, soit les saisons 1955-56 à 1958-59.
Donc c'est ça pour cette petite expérience de vérification historique et biographique. Je suis bien déçu parce que ça aurait vraiment été cool comme fait sur la grande carrière de cette légende. Mais finalement il était bon et dangereux, quelque soit la période où le temps de l'année...
samedi 31 mai 2025
La remise de la Coupe en 1966
vendredi 30 mai 2025
Toucher au trophée
Les Oilers et les Panthers se retrouvent de nouveau en finale et comme c'est la plate coutume depuis trop longtemps, il fallait attendre de voir si le capitaine allait toucher son trophée de conférence respectif. Du côté des Panthers, ils ont opté pour ne pas toucher au trophée Prince-de-Galles (après y avoir touché en 2023 et s'être abstenu en 2024). Pour les Oilers, Connor McDavid a touché au trophée Clarence Campbell cette année, alors qu'il s'était abstenu l'an passé.
Mais que c'est donc plate tout ça.
Et en plus d'être devenu une tradition/superstition que je trouve idiote et qui enlève au spectacle, ça n'a vraiment aucune importance et ça n'affecte en rien le résultat ultime. Voici un tableau (très) scientifique de la chose, en se concentrant premièrement sur le trophée Campbell depuis la saison 1998-99, soit un échantillon de 25 saisons.
En résumé, les clubs n'ayant pas touché au trophée ont remporté 9 fois la Coupe Stanley et l'ont perdu 9 autres fois. Les clubs ayant «OSÉ» toucher au trophée ont perdu 3 fois en finale et l'ont emporté 4 fois.
Donc si cela sert à prouver quelque chose, même si ça ne prouve rien, c'est que le clan «TOUCHER au trophée» est meilleur que de ne pas y toucher, l'emportant par une seule instance.
Oui mais ça c'est seulement le trophée de l'ouest, me direz-vous. Ok. Allons voir dans l'est.
Alors dans l'est. Toucher au trophée a remporté 8 coupes et en a perdu 6. Pas touche en a gagné 4 et en a perdu 7.
Donc une autre victoire encore plus décisive du clan «Touches-y au christie de trophée».
Faites comme Ovechkin qui a même pris l'avion avec en 2018:
Donc, si ça marche même pas, pourquoi cette superstition existe et comment ça a commencé?
Dans ce documentaire de la coupe de 1993, Benoit Brunet explique qu'ils étaient tous fier d'y toucher et même de parader avec comme si c'était la Coupe Stanley. Même que chaque joueur a pu le prendre en paradant sur la glace.
De nos jours, même si quelqu'un y touche, il s'agit bien probablement
seulement du capitaine, qui accepte de le prendre une trentaine de
secondes et de retraiter vite au vestiaire. Pas mal moins le fun...
Mais était-ce un cas isolé en 1993 d'assiter à autant de célébration? C'était tu juste Montréal qui est plus crinqué que le reste de la ligue comme d'habitude?
Et bien fouillons dans les années précédentes pour voir.
En 1991 à Pittsburgh, c'était semblable à Montréal, même encore plus le fun. L'année suivante, comme la série avait été remportée à
Boston, la coutume de l'époque était que le club gagnant le reçoive dans leur
vestiaire après la partie.
Comme ici en 1990 avec les Oilers, alors qu'ils avaient remporté le trophée à Chicago. Dans leur cas, on voit pas mal moins d'excitation de leur part mais c'était compréhensible puisqu'ils l'avaient gagné 5 autres fois dans la décennie précédente...
Donc, partons du point de référence qu'est 1993 (et première saison de Gary Bettman en poste) et essayons de trouver à quel moment ça a vraiment changé.
En 1994, les Rangers et les Canucks ont tous touché à leur trophée respectif. Mais on peut déjà commencer à trouver des failles avec Trevor Linden qui échappe le couvercle du trophée (pourquoi c'est pas soudé ensemble?) en le soulevant. C'est peut-être à ce moment que la superstition a commencé à planter ses graines...
Je viens finalement de découvrir qui était à l'origine de cette superstition. Et comme lors de plusieurs moments controversés qui ont changé le visage du hockey durant les années 90, il s'agit d'Eric Lindros...
1997 était la première année qu'une équipe fit un point d'honneur de ne pas toucher le trophée avec Eric Lindros, un habitué de refuser des trucs, qui ne fit que poser pour une photo avec le trophée en compagnie du gars de la ligue (même pas Bettman) avant de rejoindre ses coéquipiers.
Du côté de l'ouest, les Red Wings retournaient en finale après leur défaite de 1995 et y retouchèrent sans problèmes, en plus d'éliminer ensuite les Flyers en seulement 4 matchs.
Donc comme première instauration de la tradition, on pouvait dire que c'est râté. En 1998, les Red Wings y retouchèrent de nouveau, même chose pour leurs opposants, les Capitals.
Ensuite, ce sont les Sabres de 1999 qui perpétuèrent en deuxième cette tradition malfamée. Et encore une fois, aucun argument solide selon quoi cela porte chance puisque les Sabres perdirent la coupe en 6 matchs contre les Stars, le tout décidé par un but en prolongation controversé de Brett Hull.
Ensuite, tout le monde retrouva ses esprits et toucha au trophée dans chaque conférence de 2000 à 2002. Les Mighty Ducks d'Anaheim vinrent toutefois fucker la patente en 2003 en refusant de toucher au trophée Campbell, encore une fois dans une cause perdante. 0 en 3 jusqu'à date...
C'est en 2004 qu'on peut finalement voir un argument pour la cause puisque les champions, le Lightning, ne toucha pas au trophée, tandis que les Flames y touchèrent... OH!
Je crois que c'est à ce moment que la superstition est vraiment devenue mainstream. La saison suivante de 2006, après un lock-out en 2005 où vraiment personne ne toucha à rien, les deux clubs en finale, les Oilers et les Hurricanes, refusèrent de toucher au trophée, soit la première fois que cela se produisit dans les deux conférences en même temps. C'est sûr que quand aucun y touche, on peut pas dire que ça porte chance ou non...
On commença même à voir la nouvelle superstition dans la série de jeux vidéos NHL.
Ensuite, 2007 vint cimenter la légende de cette superstition/malédiction alors que les Sénateurs y touchèrent et perdirent, tandis que les Ducks n'y touchèrent pas (comme en 2003) et remportèrent les grands honneurs.
Mais, après avoir perdu en finale en 2008 sans avoir touché au trophée Prince de Galles, Sidney Crosby décida d'y toucher lors du rematch de 2009 et cette fois-ci, ils gagnèrent.
Ouais... On peut dire qu'il s'agissait pas d'une célébration comme en 1993. Il l'a pris dans ses mains, mais il l'a pas vraiment soulevé à bout de bras non plus, tandis que Malkin et Gonchar y touchèrent à peine et c'en était fini de ce protocole. Y'a des joueurs bantam qui sont plus contents que ça en recevant une médaille en plastique pour un tournoi à Chibougamau.
Bref c'est pas mal ça. Depuis, c'est plus ou moins la même chose, quelques équipes y touchent, d'autres non, et tout le monde fait semblant que c'est important pendant 2-3 jours.
Les Penguins ont gardé l'habitude d'y toucher lors de leur double conquête de 2016 et 2017, même chose pour le Lightning qui y toucha lors de leurs trois participations consécutives de 2020 à 2022 terminant 2 en 3.
Mais on peut vraiment dire que ces deux magnifiques trophées ont perdu leur lustre. En plus, le trophée Prince de Galles a été instauré en 1925, donc exactement 100 ans cette année, et personne en parle, quoique il n'a pas toujours eu la même fonction de mérite, étant d'abord décerné au champion de la division américaine de 1925 à 1937 et ensuite au champion de la saison régulière jusqu'en 1967.
C'est quelque chose de se rendre en finale, même si on perd. Comme ce cher Benoit Brunet l'a dit, ça arrive pas souvent, même jamais pour plusieurs joueurs. Je me rappelle de 2021 avec le Canadien. Même si je savais qu'ils allaient se faire détruire en finale, j'étais fier de cette présence en finale et la série de finale de conférence contre Las Vegas était épique.
Au baseball et au football, on en fait pas mal plus une grosse affaire. Mais au hockey c'est la coupe ou rien. Et c'est un peu dommage.