J'ai une fascination pour l'histoire de la Prohibition aux États-Unis. J'ai beaucoup lu sur le sujet, j'ai regardé beaucoup de documentaire à ce sujet. D'ailleurs, je vous recommande fortement la série sur la Prohibition de PBS produite l'an dernier. En fait, ce que j'aime de l'histoire de la Prohibition, c'est qu'elle nous montre bien que ce n'est pas en interdisant des choses que certains jugent immorales que l'on peut les empêcher. On peut se baser sur l'exemple de la Prohibition aux États-Unis afin de penser la relation qu'on a en tant que collectivité avec certaines pratiques sociales même si on est en désaccord avec (à vous de les nommer).
Anyway, dans cette volumineuse histoire où les États-Unis étaient déchirés entre les grandes villes pratiquant un édonisme hypocrite de A à Z avec la loi et une campagne sur le pied de guerre avec des principe moraux, la prohibition a eu des répercussions jusque dans le monde du hockey. C'est d'ailleurs la prohibition qui a aidé le développement du hockey aux États-Unis. Cette histoire est reliée à un gangster nommé Bill Dwyer.
Bill Dwyer est né en 1883 dans Hell's Kitchen, quartier de New York. Il travaillait comme manutentionnaire dans le Port de New York lorsque le vote de l'acte Volstead en 1919 qui instaurait la Prohibition passa. Dwyer, qui contrôlait les entrées et venues du Port de New York, devint rapidement un des organisateurs principaux de l'entrée illégale d'alcool à Manhattan. Avec le temps, Dwyer organisa un système puissant afin d'importer de l'alcool de l'Europe. En 1925, il se fit arrêter par un agent du Prohibition Bureau qui faisait une opération undercover en garde-côte que Dwyer essayait de corrompre afin de faciliter l'entrée d'alcool aux États-Unis. Il fut alors condamné à 2 ans de prison. Après avoir servi 13 mois, il fut libéré pour bonne conduite. Il quitta à sa sortie le milieu criminel en tentant de légitimer ses affaires, notamment dans le domaine du gambling ainsi, et c'est le cas qui nous concerne, dans le sport professionnel.
C'est en 1925 qu'un certain Tex Rickard, un puissant promoteur de boxe de New York, recommanda à Dwyer d'acheter une équipe de hockey afin de les faire évoluer dans le nouveau Madison Square Garden, cet amphithéâtre moderne dont ce dernier avait la gestion des évènements sportifs. Dwyer écouta le conseil de son ami (qui fondera par la suite sa propre équipe afin de compétitionner avec les Americans, les Rangers de New York) et acheta les Tigers d'Hamilton pour la somme de 75000$. Les Tigers (anciens Bulldogs de Québec) avaient connu une saison de rêve en 1924-25, mais avaient été suspendus et retirés des séries éliminatoires en raison de protestations des joueurs qui revendiquaient de plus gros salaires. C'est donc une équipe assez forte qui prit le chemin de New York afin de devenir la deuxième équipe américaine de la NHL après les Bruins qui firent leur entrée l'année précédente.
Possédant de gros moyens, Dwyer offrit des lucratifs contrats aux joueurs de la NHL. Il offrit par exemple un contrat à la bougie d'allumage de l'équipe, Billy Burch, gagnant du trophée Hart en 1925, un contrat qui aurait été de 25000$ pour 3 ans, une forte somme pour l'époque. Dwyer, en bon homme issus du crime organisé, essayait également de truquer les matchs afin de tirer profit des paris. On raconte qu'il payait par exemple des juges de but qui se devaient d'allumer la lumière lorsque la rondelle touchait la ligne de but. Malgré ce stratagème, les Americans étaient une équipe assez moyenne, malgré ses succès.
Étant le propriétaire d'une équipe connaissant assez de succès, Dwyer se porta acquéreur secrètement d'une autre équipe de la NHL en 1928, les Pirates de Pittsburgh. Aussitôt achetée, Dwyer utilisa le boxeur Benny Leonard afin de paraître comme étant le propriétaire de l'équipe.
En 1930, Dwyer acheta les Triangles de Dayton de la NFL et les déménagea à Brooklyn en les renommant les Dodgers de Brooklyn. Utilisant le même nom que la fameuse équipe de baseball, les Dodgers jouaient également au Ebbets Field, le célèbre stade de l'équipe. Malheureusement pour lui, l'expérience fut assez catastrophique. Il vendra l'équipe après 3 saisons qui furent déficitaires, Dwyer vendit l'équipe à des anciens joueurs des Giants, Chris Cagle et John Simms Kelly. À la même époque, les Pirates, alors déménagés à Philadelphie sous le nom Quakers, disparurent. Il ne resta donc à Dwyer que ses Americans.
Durant les années 1935 et 1936, le gouvernement américain poursuivit Dwyer afin de lui saisir ses avoirs acquis fait durant la Prohibition, ce qui le laissa sans le sou mis à part son équipe de hockey. N'ayant pas d'argent pour investir dans son équipe dont la popularité diminua en raison des succès des Rangers, la NHL menaça de saisir l'équipe. Passant à l'action, la NHL saisit l'équipe au début de la saison 1936-37. Dwyer poursuivit par la suite la NHL mais les deux partis en vinrent à une entente, laissant Dwyer diriger l'équipe en espérant qu'il paie ses dettes. Afin de s'y faire, le manager/entraîneur des Americans, Red Dutton, prêta 20000$ à Dwyer qui le perdit aussitôt en jouant. À la fin de la saison, voyant que les finances de Dwyer étaient toujours au plus bas, la NHL saisit l'équipe.
Bill Dwyer mourût en 1946 d'une crise cardiaque dans un relatif anonymat. L'équipe de hockey qu'il avait aidé à fonder, les Americans de New York, était alors une franchise suspendue depuis 4 ans. La franchise fut d'ailleurs officiellement suspendue la même année que la mort de son propriétaire original.
Contrairement à la plupart des fondateurs des diverses équipes de la NHL, Bill Dwyer ne fut jamais intronisé au Temple de la renommée en tant que bâtisseur, pourtant, malgré l'illégalité de la plupart de ses revenus, il aida fortement à l'établissement du hockey aux États-Unis... D'ailleurs, Tex Rickard n'a également jamais été intronisé non plus...
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