Voici le récit d’une ligue qui n’a jamais vraiment débuté ses activités et qui est disparue péniblement et discrètement du radar. Si vous trouviez que l’AMH originale était un peu "boboche" et bien attendez de voir l’histoire de la deuxième AMH.
Bobby Hull, lors du dévoilement de la nouvelle AMH |
En 2003, alors que le climat du hockey professionnel s’annonçait ombrageux avec l’arrivée imminente d’un autre lock-out, deux hommes d’affaires du nom de Allan Howell et Nick Vaccaro annoncèrent la résurrection de la World Hockey Association (ou Association Mondiale de Hockey) dont ils acquirent les droits d’appellation. Ils nommèrent l’ancienne star de l’ancienne AMH, Bobby Hull, comme commissaire de la ligue et entreprirent de procéder à l’implantation d’équipes professionnelles dans plusieurs marchés majeurs à temps pour la saison 2004-05. Ils espéraient ainsi profiter du vide qu’allait laisser le lock-out afin de lancer leur nouvelle ligue avec un bon momentum et de capitaliser sur l’absence de la LNH.
WHA2 (2003-2004) |
Afin de lancer leur entreprise, la nouvelle AMH commença tout d’abord par créer sa propre ligue mineure de développement avec la création de la WHA2 pour la saison 2003-04, soit un an avant le lancement proposé de la grande ligue en 2004-05. La WHA2 opéra avec 6 clubs en Floride, en Georgie et en Alabama. Plusieurs de ces clubs provenaient d’une ancienne ligue semi-pro, la Atlantic Coast Hockey League. On espérait ainsi préparer au moins une base pour les futures équipes de la nouvelle AMH mais la WHA2 ne fut en place que durant cette seule saison. Le proprio de la WHA2, David Waronker, eut une mésentente avec les proprios de l’AMH qui lui ordonnèrent de cesser d’utiliser le nom après cette seule saison. Les clubs survivants joignirent ceux d’une autre ligue, la South East Hockey League et créèrent par la suite la Southern Professional Hockey League (SPHL), ligue qui existe toujours.
Comme son ancêtre, la nouvelle AMH voulait également capitaliser sur les faiblesses de la LNH mais cette fois-ci, plutôt que d’offrir des contrats faramineux et de voler des vedettes à la LNH, la nouvelle AMH aurait implanté un cap salarial de 15 millions de dollars par équipe. Bobby Hull était cependant catégorique que l’AMH ne rivaliserait pas avec la LNH, mais offrirait plutôt une “alternative” à la grande ligue. Écœuré du système en place, il tenait également à implanter de nouveaux règlements comme le retrait de la ligne centrale, la diminution de l’obstruction, les dégagements refusés sans contact et la réduction de l’équipement des gardiens de buts. Ironiquement, tous ces changements proposés ont plus tard été adopté par la LNH.
La nouvelle AMH annonça lors de sa première conférence de presse la création de ses propres équipes “Original 6” avec tout d’abord des équipes à Halifax, Québec, Detroit, Dallas, Orlando et Jacksonville en Floride. Plus tard il fut décider de n’opérer qu’une seule équipe en Floride. Ils annoncèrent également la venue possible d’équipes à Toronto, Hamilton et Vancouver, ce qui aurait donné 8 équipes au total pour la première saison de la ligue.
5 de ses équipes allèrent jusqu’à adopter un nom et un logo; les Gladiators de Detroit, les Americans de Dallas, les Toros de Toronto, les IceBreakers d’Halifax et bien sûr les NORDIKS de Québec. Voici quelques faits marquants de la courte histoire de ces quelques franchises qui, à leur manière, ont beaucoup imité les anciens clubs de l’ancienne AMH avec leurs plans un peu broche-à-foin…
Les Gladiators de Detroit auraient évolué non pas au Jos Louis Arena mais plutôt au Silverdome de Pontiac, une banlieue de Detroit au Michigan. Cet aréna n’avait cependant jamais accueilli du hockey auparavant et n’avait plus d’occupant depuis 2002. Il fut fermé en 2006 et vendu aux enchères en 2009 et referma en 2013 suite à quoi il fut démoli. Les Gladiators nommèrent l’ancien joueur Moe Mantha comme le premier entraineur de l’équipe, la seule de la ligue à avoir eu un entraîneur officiel.
Les Americans de Dallas espéraient être la franchise phare de la ligue et misaient particulièrement sur un de leur actionnaire minoritaire, le gardien vedette Ed Belfour qui aurait fait un Mario Lemieux de lui-même en devenant lui aussi joueur/proprio. Un peu comme Bobby Hull avec les Jets de 1972, Belfour aurait lui aussi amené une crédibilité à la nouvelle ligue.
Les Toros de Toronto auraient fait revivre l’ancien surnom de l’équipe de la vieille AMH qui exista de 1973 à 1976 mais avec un nouveau logo. Ils voulaient occuper le Ricoh Coliseum de Toronto mais furent empêchés par les Maple Leafs qui voulaient y déménager leur club école, les Marlies, qui évoluaient jusque là à Saint-John’s.
Les IceBreakers auraient été la première équipe professionnelle de l’histoire d’Halifax. Ils n’eurent cependant pas le temps de développer autre chose qu’un logo (inspiré des Islanders?).
Le président de la nouvelle équipe de Québec était l’avocat Jean-Paul Boily. Il décida de faire revivre les anciens Nordiques sous l’épellation NORDIKS avec un K parce que c’est plus “Kool” mais aussi parce que la LNH détenait toujours les droits sur le nom. Selon ce que rapportait RDS lors du dévoilement du logo en juillet 2004, le logo “représente un ours sympathique qui revêt autant la bonne humeur que l'agressivité pour mener à bien sa tâche. La déchirure montre aussi qu'il peut laisser des traces et il signifie la froideur de notre climat hivernal.” Toujours selon Maître Boily, "Le nom N-O-R-D-I-K-S est un nom qui se retrouve dans le dictionnaire. Notre logo est complètement différent de celui qui existait à l'époque, donc cela ne porte pas à confusion”. Les Nordiks auraient occupé le Colisée Pepsi si la ligue avait bel et bien levé.
La ligue organisa par la suite deux repêchages le 18 juillet 2004; un repêchage amateur et un d’expansion. Il y avait alors 8 équipes dans la nouvelles ligue inscrites à ce repêchage; Quebec, Toronto, Halifax, Detroit, Hamilton, Dallas, Floride et Vancouver. Sidney Crosby fut choisi au premier rang par l’équipe de Toronto mais refusa de signer un contrat avec la nouvelle ligue. Thomas Vanek a quant à lui été choisi au 2e rang par Halifax tandis que les Nordiks ont jeté leur dévolu sur… Steve Bernier. Lors du repêchage d’expansion, les Nordiks détenaient le 1er choix et ont choisi Simon Gagné. D’autres joueurs avaient porté de l’intérêt à se rapporter à l’AMH. C’était le cas de Brett Hull, qui avait décidé qu’il joindrait la nouvelle ligue de son père en cas de lock-out.
Il se révéla que d’imaginer des noms d’équipes et créer des logos était beaucoup plus facile que de vraiment organiser et financer une nouvelle ligue majeure. Et comme l’ancienne AMH, beaucoup de clubs se retirèrent de l’aventure. C’était effectivement encore plus difficile d’organiser une équipe en 2004 qu’en 1972. Les choses commencèrent officiellement à dérailler suite aux repêchages de juillet. La franchise de Québec ne put sécuriser un bail au Colisée (faut le faire) et la ligue retira leur application. La même chose arriva ensuite pour l’équipe de Toronto, aussi incapable de trouver un aréna. L’équipe Floridienne (d’abord basée à Miami ensuite Jacksonville et finalement Orlando) se retira également. La ligue prévoyait originalement de disputer un calendrier de 74 matchs qui aurait débuté à la fin octobre mais lors du mois de septembre, avec seulement 4 équipes toujours en lice, la ligue repoussa son début de saison pour novembre. La franchise “phare” de la ligue, Dallas, baissa pavillon également au début d’octobre ce qui poussa la ligue à effectuer un “remaniement”, chose qui n’arriva jamais. Belfour et ses associés déclarèrent “qu’ils ne pouvaient se permettre de rester dans une ligue qui n’a pas l’air destinée à naître … la ligue aurait eu besoin d’un meilleur leadership et elle ne l’a pas eu.”
Pendant que de plus en plus de joueurs optèrent de jouer en europe plutôt que de s’aligner dans l’AMH, Howell et Vaccaro partirent à la recherche d’autres investisseurs pour les droits du nom de l’AMH. Ils trouvèrent preneur en la personne de Ricky Smith, un investisseur de la Colombie-Britannique qui espérait toujours pouvoir lancer la nouvelle ligue, même s’il fallait attendre à la saison 2005-06 et compétitionner directement avec la LNH. Smith prit également la décision d’inscrire la WHA à la bourse en 2005, une décision plus que mal avisée.
En 2005, alors que la LNH avait officiellement annulé sa saison 2004-05, l’AMH organisa un tournoi nommé le “Bobby Hull Invitational Tournament” où il fut annoncé que 200 joueurs de la LNH avaient montré de l’intérêt pour y participer. Le tournoi aurait eu lieu du 20 mai au 2 juin 2005 entre 6 équipes qui se seraient disputé une cagnotte de 2 millions de dollars. Parmi les joueurs qui auraient montré de l’intérêt, on retrouvait Keith Primeau, Jarome Iginla, Tony Amonte et Dany Heatley et le tournoi aurait été parrainé par Phil Esposito.
Cependant le tounoi n’a jamais eu lieu. Esposito se retira de l’aventure lorsqu’il ne reçut pas une avance sur ses frais de promotion. Il déclara que “s’il ne peuvent même pas me payer, comment pourront-ils louer les arénas où ils veulent jouer?”. Un agent de joueur anonyme déclara pour sa part qu’il n’avait pas reçu de réponses après 4 courriels et que Ricky Smith ne retournait pas ses appels… Le tournoi fut donc annulé sans aucune annonce officielle de la part de la ligue ou de Bobby Hull. On commençait alors à moins entendre parler de la nouvelle ligue dans les médias.
Suite à cette série d’échecs, Smith tenta de continuer de faire revivre le nom de la WHA à travers d’autres projets. On parla d’organiser une autre ligue semi-pro en Pennsylvanie et au Midwest mais ces plans furent abandonnés abruptement suite à une poursuite de l’agent de change de la compagnie. En septembre 2005, ils tentèrent d’installer une nouvelle base pour leur ligue en fondant une ligue junior, cette fois en Floride, du nom de la WHA Super Junior League. Derrière ces plans figurait toujours l’espoir d’instaurer une ligue majeure et on parlait à ce moment de la saison 2007-08. Bobby Hull organisa un camp de recrutement pour de jeunes joueurs en Floride et selon mes recherches il y eut quelques matchs de disputés dès le mois d’octobre. La ligue fut toutefois suspendue sans préavis pour les jeunes joueurs et les communautés impliquées. On commença alors à douter des intentions de Smith et de la WHA qui semblait n’être qu’un énorme arnaque envers leurs investisseurs et maintenant envers de jeunes joueurs et leurs familles.
Un an plus tard, soit en septembre 2006, la WHA retenta le coup avec une ligue autre junior et créa la WHA Junior West Hockey League en Colombie-Brittanique. La WHA s’associa avec la ligue Junior A de l’Ontario afin de créer la “National Junior Hockey Alliance”. Ils avaient ainsi pour but de créer un championnat entre les deux ligues. Cette nouvelle WHA avait exactement le même logo que la ligue des années 70 et il en était de même également pour les équipes. On retrouvait donc des équipes telles que les Bulls de Bellingham, les Fighting Saints de Lumby et les Whalers de New Westminster. Encore une fois, la ligue avait Bobby Hull comme commissaire.
De 2006 à 2008, la WHA Junior West Hockey League opéra dans un climat toxique de poursuites entres actionnaires et d’instabilité chez les équipes dont plusieurs quittèrent après la 1re saison. Il y eut également plusieurs poursuites envers la WHA. C’était entre autres le cas de la compagnie d’autobus Vancouver Tours Bus Lines qui aurait obtenu plus de 70,000$ en frais impayés lors d’un procès en 2007. La ville d’Osoyoos, où évoluait le club des Spurs d’Osoyoos, termina son association avec l’équipe après qu’ils n’aient pas payés des frais de plus de 14,000$ pour la location de l’aréna et le club ne termina pas la 2e saison de la WHA dont le calendrier fut écourté. Il y eut également quelques reportages concernant des frais de remboursement aux joueurs impayés par Smith et quelques allégations selon lesquelles il se serait inscrit plusieurs chèques à son nom au lieu de rembourser les joueurs. Au même moment, les actions de la ligue étaient descendues de 2$ à moins de 1 cent en l’espace d’un an.
La ligue était également devenue hors-la-loi aux yeux de Hockey Canada qui menaçait de suspendre tout joueur inscrit dans la WHA. Aucun club ne tenta de monter une équipe pour la saison 2008-09, même si la ligue prévoyait jouer une 3e saison. Le dernier message provenant du site de la WHA fut celui concernant cette menace de suspension. Le site web ferma en juillet 2009 (après un paiement manqué).
En janvier 2009, la firme Global Developments remporta son procès contre la WHA l’accusant de dilapidation des intérêts de Global dans leur compagnie. Global remporta plus de 4.3 millions et la WHA fut retiré du marché de la bourse. Smith tenta lui aussi d’actionner quelqu’un à son tour. Il déclencha une poursuite contre Hockey Canada, Hockey BC, la Pacific International Junior Hockey League (sa rivale dans l’ouest) ainsi qu’un ex-entraîneur de la WHA, Matt Samson. Il accusa tout ce beau monde de conspiration et de manigances envers la WHA afin d’empêcher des joueurs de s’y inscrire.
Aucune information sur l’aboutissement de ce procès et il s’agit de la dernière mention récente que j’ai trouvé concernant Ricky Smith ou la WHA qui mériterait selon moi de rester morte et entrée au lieu d'être utilisée de la sorte.
Sources:
http://www.rds.ca/hockey/place-aux-nordiks-de-quebec-1.328112
http://slam.canoe.com/Slam/Hockey/WHA/2005/04/26/1013458.html
http://slam.canoe.com/Slam/Hockey/WHA/2005/03/15/961495.html
http://slam.canoe.com/Slam/Hockey/WHA/2004/10/01/651501.html
http://www.sportsbusinessdaily.com/Daily/Issues/2004/09/Issue-14/Franchises/Dallas-Americans-Pull-The-Plug-On-Playing-In-WHA-This-Season.aspx
http://www.theglobeandmail.com/report-on-business/hulls-wha-lands-in-penalty-box/article17991404/
http://eclipse.sys-con.com/node/355947
http://www.espn.com/nhl/columns/story?id=1967012
The Complete Historical and Statistical Reference to the World Hockey Association, 1972-1979, Scott Surgent
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