Voici une histoire de famille tissée serrée.
Bill, l’aîné, est né à Brantford. Sa famille déménagea toutefois à Kingston, où il apprit à patiner sur le canal Rideau. Frederick (surnommé ″Bun″) et Alexander (surnommé ″Bud″) suivirent quelques années plus tard. Lors de leurs éventuelles carrières de hockey, les frères se suivront également à plusieurs reprises.
Mais avant de débuter sa carrière professionnelle, Bill s’enrôla dans l’artillerie et prit part à des batailles marquantes de la Première guerre mondiale, comme celle d’Ypres, de la Somme et de la crête de Vimy. Il passa aussi huit mois en Russie lors d’une intervention des Alliés pendant la guerre civile en faveur des armées blanches dans leur combat contre les Bolcheviks. À son retour au Canada, on lui décerna la médaille militaire pour souligner sa bravoure.
Il joua ensuite au niveau senior avec Sault-Ste-Marie, pour ensuite être rejoint par Bun en 1921-22. Bill prit ensuite le chemin de l’ouest en 1922 et s’aligner avec les Crescents, puis les Sheiks de Saskatoon de la WCHL. Pendant ce temps, Bun remporta la Coupe Allan avec Sault-Ste-Marie en 1922-23 pour ensuite rejoindre Bill en 1924-25 à Saskatoon. Jouant sous les ordres de l’ancien Canadien Édouard ″Newsy″ Lalonde, Bill remporta le championnat des compteurs de la ligue en 1923-24, 1924-25 et 1925-26.
Ce titre de 1925-26 s’avéra toutefois le dernier de l’histoire de la ligue, puisque celle-ci s’écroula. Par contre, alors que la ligue de l’ouest (qui s’appelait maintenant la WHL) disparaissait, la LNH prenait du coffre. Si les nouveaux Cougars (futurs Red Wings) de Détroit firent des achats en vrac en achetant pratiquement en entier les défunts Cougars de Victoria, pendant que les nouveaux Black Hawks de Chicago faisaient de même avec les Rosebuds de Portland, les nouveaux Rangers de New York furent plus méthodiques. Mais parmi leurs acquisitions, on comptait Bill et Bun Cook, qui semblaient se destiner aux Maroons de Montréal, mais que Conn Smythe leur soutira en agissant plus rapidement.
Suivant les conseils des frères Cook, Smythe embaucha également Frank Boucher, qu’ils avaient côtoyé dans l’ouest, alors que ce derrnier jouait avec les Maroons, mais de Vancouver. Celui-ci devint alors le centre des frères (Bun à gauche et Bill à droite).
C’est à New York qu’un journaliste écrivit que Frederick était rapide comme un lapin (″quick as a bunny″). Il a donc été surnommé ″Bunny″ Cook. Et puis ″Bunny″ est devenu ″Bun″ et comme ″Bun″ veut dire brioche, le trio est devenu la ″Bread Line″. Ils joueront ensemble pendant plusieurs années.
Bill fut non seulement le premier joueur signé par les Rangers, mais aussi leur premier capitaine et le marqueur du premier but de leur histoire. Ce but fut d’ailleurs victorieux, car les Rangers remportèrent leur match match par la marque de 1-0, contre ces mêmes Maroons.
L’audace de Smythe (qui quitta toutefois les Rangers peu de temps après) rapporta aussi d’autres dividendes, puisque Cook remporta le championnat des pointeurs lors de sa première année dans la LNH, avec une fiche de 33 buts et 4 passes. (Le Trophée Art Ross n’existait pas encore.) Pourtant à leur première année, les Rangers terminèrent aussi premiers de la nouvelle division américaine, devançant les Bruins de Boston et les Pirates de Pittsburgh, des équipes de deuxième année. Boston prit toutefois sa revanche en séries, en éliminant les Rangers et en les limitant à un seul but, compté par Bill Cook.
En 1927-28, à seulement leur deuxième année, les Rangers se reprirent en battant les Pirates de Pittsburgh, les Bruins et finalement les Maroons, pour mettre la main sur leur première Coupe Stanley. L’année suivante, ils se rendirent à nouveau en finale, mais ils s’inclinèrent devant Boston.
En 1932-33, Bill ajouta un deuxième titre des pointeurs à son palmarès. À 36 ans et 5 mois, il devint ainsi le plus vieux champion pointeur de l’histoire de la ligue. Sa marque tiendra jusqu’en 2013, alors que Martin St-Louis la battit, à l’âge de 37 ans. Les Rangers remportèrent également une deuxième coupe. C’est Bill qui marqua en prolongation l’unique but du match lors du quatrième et ultime match. Étonnamment, on n’avait pas jugé bon d’apporter la Coupe ce soir-là. Ce n’est qu’au premier match de la saison suivante, le 11 novembre, à Toronto, que les joueurs reçurent le trophée convoité, qui a été désignée comme étant la ″Forgotten Cup″.
Suite à des problèmes arthritiques qui lui fit rater la majeure partie de la saison 1935-36, les Blueshirts vendirent le contrat de Bun aux Bruins. S’il joua une saison à Boston, la suite leur donna raison puisqu’il dut ensuite prendre sa retraite pour cette raison. Après cette première saison dans la LNH sans son frère, Bill prit également sa retraite, laissant Boucher comme dernier membre de la Bread Line à New York.
Les deux frères débutèrent alors leur carrière d’entraîneur au même moment (tout en jouant quelques matchs au besoin) dans l’International-American Hockey League (IAHL, la future Ligue américaine).
Bill prit le chemin de Cleveland pour diriger les Barons. Il y retrouva là son autre frère Bud, qui eut l’occasion de jouer au fil des ans quelques matchs avec les Bruins, les Senators et les Eagles de St-Louis. C’est toutefois dans ce qui deviendra la Ligue américaine qu’il se fit une place.
Quant à Bun, il se dirigea vers Providence pour se retrouver derrière le banc des Reds. S’il a connu une belle carrière (il a entre autres inventé la ″drop pass″) et montré des statistiques intéressantes, il a toutefois toujours été un peu dans l’ombre de son frère. Lorsqu’ils sont devenus entraîneurs, ce fut le contraire. Bill a eu sa part de succès, mais c’est Bun qui a pris le haut du pavé.
À leur première saison, en 1937-38, ce sont les Reds de Bun remportèrent la Coupe Calder (qui existait seulement depuis la saison précédente). L’année suivante, ce fut au tour des Barons de Bill. Les Reds de Bun répliquèrent en 1939-40, avant que Cleveland reprenne le titre en 1940-41, avec Bill derrière le banc et Bud dans l’alignement. Des cinq premières Coupes Calder, quatre fois l’équipe gagnante était dirigée par un Cook.
Les deux frères demeurèrent à leur place pendant deux autres années avant que Bill ne devienne directeur-gérant des Barons. Pour le remplacer, il eut l’idée de faire appel à… Bun. À ce moment, Bud jouait toujours pour Cleveland. Il eut donc l’occasion de jouer sous les ordres de son autre frère. L’expérience ne dura toutefois pas longtemps, car en cette période de guerre, après 4 matchs, il se rapporta à la garde côtière et se joignit à leur équipe de hockey.
Bun s’installa à long terme à Cleveland et passa les 13 saisons suivantes comme entraîneur. Il y connut un succès phénoménal. Dès ses trois premières saisons (1943-44 à 1945-46), son équipe atteignit la finale, la remportant en 1945. Par la suite, il répéta l’exploit en 1948, 1951, 1953 et 1954, en plus d’atteindre la finale en 1950 et en 1956. Par la suite, personne ne s’est approché de son palmarès de sept Coupes Calder. Les suivants en ont trois. Toutefois, dans une ligue à six équipes, il n’a par contre pas eu l’occasion de graduer dans la LNH.
C’est plutôt Bill qui y parvint. En effet, lorsque Neil Colville démissionna de son poste en décembre 1951, le directeur-gérant des Rangers Frank Boucher demanda à son ancien compagnon de trio de la Bread Line de prendre sa place. Bill était alors à Saskatoon, pour diriger un club affilié aux Rangers. À ce moment, les Rangers étaient constamment mauvais et Bill ne put renverser la tendance. Suite à une dernière place en 1952-53, Boucher releva Bill de ses fonctions et prit sa place. Bill prit alors sa retraite du hockey.
À la fin de sa carrière de joueur, Bud tenta aussi sa chance comme entraîneur. Il fut entre autres à la tête des As de Québec de la Ligue senior du Québec en 1945-46 et 1946-47. Il eut alors Punch Imlach sous ses ordres.
Suite à sa participation à la guerre, Bill avait reçu une terre en Saskatchewan de la part du gouvernement. Il passa alors beaucoup de temps à la cultiver et, toujours proche de son frère, Bun en acheta une tout près. Ils retournèrent ensuite à Kingston plus tard dans leur vie.
Lors du déménagement du Madison Square Garden III au Madison Square Garden IV en 1968, on demanda à Bill, qui avait compté le premier but des Rangers, de venir participer à une cérémonie pour compter le premier but du nouvel immeuble.
Bill mourut en 1986, Bun en 1988 et Bud en 1993.
Bill fut admis au Temple de la renommée du hockey en 1952. Bun ne le vit pas de son vivant, puisqu’il fut admis en 1995. Il fut aussi admis à celui de la Ligue américaine en 2007.
Sources :
″Les clubs américains débutent victorieusement, hier soir″, 17 novembre 1926, La Patrie, page 6,
″W. Cook scores as Rangers take Cup; Beat Toronto 1-0″ d’Elmer Dulmage, CP, April 14, 1933, Montreal Gazette, page 12,
″Outstanding Player and Coach Bill Cook Remembered as Soldier″ de Charles Edwards, CP, March 30, 1943, Ottawa Citizen, page 13,
″Bisons After Second Win″, AP, April 6, 1944, Pittsburgh Post-Gazette, page 14,
″Bill Cook Return to the N.H.L. as Coach of Rangers; Neil Colville Steps Out″, CP, December 7, 1951, Montreal Gazette, page 22,
hhof.com, hockeydb.com, wikipedia.org.
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