En 1974-75, les Éperviers de Sorel de la LHJMQ pouvaient compter sur des visages devenus plus tard familiers comme Lucien Deblois et Pierre Mondou, mais aussi sur le robuste Gilles Bilodeau. C’est principalement avec ses poings que le "Géant de St-Prime", au Lac-St-Jean, attira l’attention, en amassant 377 minutes de pénalité. Il s’agissait du deuxième plus haut total de la ligue, derrière son coéquipier Roger Séguin. Mais ayant accédé à la LHJMQ à 19 ans, il s’agira de sa seule saison.
L’année suivante, alors qu’on s’affairait à mettre sur pied un club de la Ligue nord-américaine à St-Georges, les Jaros de la Beauce, on lui fit signe. Dans cette ligue qui a inspiré le film "Slapshot", on cherchait du muscle et Bilodeau cadrait parfaitement dans cette philosophie.
C’est Rodrigue Lemoyne, son entraîneur à Sorel, qui négocia le premier contrat professionnel de Bilodeau. Celui-ci comprenait d’ailleurs une clause qui lui attribuait une prime de 25$ par bagarre. Suite à la conférence de presse où on présenta les joueurs de la nouvelle équipe, on les convia à un barbecue, où Bilodeau engloutit trois steaks de 16 onces en un temps record.
Le 18 octobre 1975, Bilodeau profita d’un match à Lewiston contre les Nordiques du Maine pour marquer son premier but au niveau professionnel. Quelques minutes plus tard, il célébra son exploit en chargeant à fond de train le gardien George Hulme, qui eut le malheur de sortir de son filet. Ne faisant aucun effort pour l’éviter, Bilodeau le projeta si fort contre la bande qu’il perdit connaissance. Il s’en suivit une bagarre, qui n’était pas la première de Bilodeau dans le match…
En novembre, contre les Comets de Mohawk Valley, Bilodeau créa une bagarre générale en sortant du banc des punitions pour s’en prendre à son adversaire. Il fut ensuite suspendu pour trois matchs, en plus d’être mis à l’amende pour 250$.
Au cours d’une suspension, alors qu’il regardait le match disputé à Syracuse, avec son coéquipier Wally Weir, Bilodeau fut impliqué dans une bagarre dans les estrades. À ce moment, les policiers utilisèrent du gaz poivre et la matraque pour le maîtriser.
La réputation de Bilodeau continua de prendre de l’ampleur lorsqu’il répondit à un adversaire avec son anglais approximatif que dépendamment de son humeur, s’il avait envie de le tuer, il le tuerait…
Bilodeau semblait vraiment avoir une dent contre les gardiens, puisque dans un match contre les Blazers de Syracuse, il profita d’un moment où l’arbitre regardait dans une autre direction pour asséner un violent double-échec à la base de la nuque de Jacques Caron. Transporté à l’hôpital, on diagnostiqua au cerbère des Blazers une fracture à la cinquième vertèbre cervicale, qui mit fin à sa saison.
Les "exploits" de Bilodeau ne passèrent pas inaperçus, dans cette période où la recherche de muscle était une préoccupation constante chez plusieurs équipes. Après de longues négociations, les Toros de Toronto de l’AMH s’entendirent finalement avec lui. Ceux-ci annoncèrent alors qu’il s’agissait d’une mauvaise nouvelle pour tous leurs adversaires. À partir de ce moment, le surnom de "Bad News" Bilodeau lui colla à la peau.
À son premier match dans le circuit maudit, le 14 mars 1976 au Colisée de Québec, contre les Nordiques, Bilodeau obtint une passe, en plus bien sûr de livrer un combat. Même s’il ne compléta pas sa saison avec les Jaros et ne joua que 58 des 74 matchs, il termina tout de même en tête de la NAHL pour les minutes de punition. Son total de 451 lui donna une avance de 140 sur son plus proche poursuivant, Dave Hanson, qui joua un des frères du même nom dans "Slap Shot". Le passage de Bilodeau avec les Jaros lui permit tout de même d’inspirer le personnage d’André "Poodle" Lussier dans le même film.
La saison suivante, les Toros déménagèrent leurs pénates en Alabama, pour devenir les Bulls de Birmingham. Dans ce marché peu traditionnel, l’intimidation fut encore plus au cœur de leur stratégie. Bilodeau fut d’ailleurs au centre du tristement célèbre "Massacre de l'Action de grâce", avec entre autres son ex-rival Dave Hanson.
En 1978-79, les Nordiques le signèrent, mais l’entraîneur Jacques Demers l’utilisa peu et Bilodeau passa du temps dans la Ligue américaine. Il demeura avec eux pour leur adhésion à la LNH en 1979-80, mais il ne joua que neuf matchs dans la grande ligue, avant d’être libéré.
Bilodeau retourna à Birmingham, d’où était originaire son épouse, pour travailler dans le secteur de la construction et où il démarra son entreprise.
En août 2008, à l’âge de 53 ans, Bilodeau mourut subitement dans une chaise de parterre chez lui. Une autopsie démontra qu’il avait un cancer du pancréas non diagnostiqué.
Sources :
"Décès de "Bad News" Bilodeau" de Johanne St-Pierre, 22 août 2008, La Presse (lapresse.ca),
Vallières, Steve, Implacables : Les Jaros de la Beauce, 1975-76, Éditions Hurtubise, 2015, pp. 39, 41, 67, 87-88, 95, 101, 106-107, 165, 169-170, 179, 261-262.
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