Le baseball a longtemps été particulièrement populaire dans ma ville
natale de St-Jean-sur-Richelieu. Ce
n’est pas un hasard si l’un des meilleurs québécois dans ce sport, Claude
Raymond (voir texte du 24 août 2011), est originaire de l’endroit.
Alphonse Dufort |
Des joueurs comme Alex Carrasquel, auparavant avec les Senators de Washington, et Lou Klein, des Cardinals de St.Louis, s’alignèrent avec les Braves. Les autres équipes de la ligue n’étaient pas en reste, avec entre autres les Cubs de Drummondville, qui purent compter pendant un moment sur Sal Maglie, des Giants de New York et Max Lanier, également des Cards.
À ce groupe, on pouvait ajouter des joueurs de la Ligue des Noirs, des
latinos et des joueurs locaux, dont Jean-Pierre Roy, Roland Gladu et Stan
Bréard, qui étaient également de retour du Mexique.
En juin 1949, devant des menaces de poursuite et la pression de certains
propriétaires, le commissaire Happy Chandler réintégra les joueurs suspendus. La Ligue Provinciale perdit alors cette
source.
L’année suivante, la Ligue fut intégrée au Baseball Majeur, comme ligue
de classe « C ». Les Braves profitèrent
de cette saison pour se mériter le championnat de la saison régulière, avec une
fiche de 58-49, en plus de remporter les séries pour une deuxième fois, après
celles de 1947. On retrouvait alors dans
l’alignement johannais le lanceur Ruben Gomez, qui connut dans l’uniforme des
Giants de New York des saisons de 17-9 en 1954, et de 15-13 en 1957.
En 1951, les Braves de Québec (voir texte du 21 août 2011), tout comme
les Royaux de Trois-Rivières d’ailleurs, quittèrent la Ligue Can-Am pour se
joindre à la Provinciale. Il y eut donc
deux des huit clubs qui avaient le même nom.
Par contre, la situation ne dura pas, puisque maintenant affilié aux
Pirates de Pittsburgh, St-Jean prit le nom de « Canadiens » en 1952. (L’ex-équipe de Farnham s’appelait déjà les
Pirates.)
Ce n’était toutefois pas la seule nouveauté pour le club de
St-Jean. Pour accommoder son équipe, au
sommet de sa popularité, la ville avait fait construire un tout nouveau stade au
coût de 200 000$ (1,87 millions $ en dollars d’aujourd’hui). L’enceinte contenait 3500 places, ce qui
était énorme pour une ville qui comptait à ce moment 19 000 habitants.
Sur le terrain, les Canadiens eurent leur meilleure saison en 1955,
alors qu’ils cumulèrent l’impressionnante fiche de 86-44. La déception fut toutefois grande lorsqu’ils
perdirent en séries au premier tour, contre Burlington.
Chuck Bullock |
Ce ne fut par contre pas la seule déception pour leurs partisans. Les Pirates cessèrent d’abord leur
affiliation. On tenta de les remplacer,
mais en vain. En plus de faire perdre
une importante source de joueurs, cette nouvelle fit aussi perdre à l’équipe
une source de revenus. Comme le club
était administré sur une base communautaire, par un conseil d’administration
élu, qui se portait garant des dettes, cette perspective n’avait rien
d’emballante. Avec un club champion en
1955, St-Jean avait attiré 45 000 spectateurs, ce qui n’était pas si
impressionnant et surtout très loin des meneurs à ce chapitre, soit Québec,
avec 101 000. En ajoutant à l’équation une dette accumulée
de 13 000$, on décida de mettre fin aux activités.
Finalement, d’autres clubs connurent des situations semblables et la
Ligue en entier cessa ses activités. Il
fallut attendre à 1958 avant qu’une autre Ligue Provinciale ne se forme. Par contre, son calendrier était limité à
peine à une trentaine de matchs et St-Jean n’en faisait pas partie. Cette ligue dura jusqu’en 1970.
Jacques Monette |
Le Stade de St-Jean se retrouva ainsi sous-utilisé, avant de connaître
une triste fin. Le 26 novembre 1964, une
chaufferette demeurée allumée causa un incendie, qui entraîna sa perte.
J’ai déjà mentionné mon amour pour les Stades Municipal de Québec et Fernand-Hébert
de Trois-Rivières (voir texte du 22 avril 2013), qui abritent tous deux une
équipe de la Ligue Can-Am, et qui ont une capacité similaire à celle qu’avait
le Stade de St-Jean.
Au moment où les matchs des Blue Jays au Stade Olympique ont ramené le
baseball dans l’actualité, et qu’un groupe tente de mettre sur pied une équipe
de la Ligue Can-Am (les Princes) pour la région de Montréal, je ne peux
qu’imaginer que la situation serait beaucoup plus simple si le Stade de St-Jean
était toujours là. St-Jean est passée de
ville industrielle, à ville en déclin, mais elle est ensuite devenue une
banlieue de Montréal. Oui, elle est à
l’extrémité sud de la région, mais la présence d’un stade déjà bâti diminuerait
grandement le risque de l’aventure. Elle
éviterait la nécessité de construire une nouvelle infrastructure, coûteuse (il
en a coûté 1 million $ seulement pour rénover celui de Québec en 1999) et très
peu versatile, pour un projet dont le succès est loin d’être assuré.
Oui, je sais, je fabule. Plein de
choses auraient pu se passer. Le Stade
aurait pu être éventuellement démoli, comme c’est venu près d’arriver à
Québec. Le passage du temps aurait pu l’abîmer. Mais bon…
Ça ne coûte pas cher de fabuler…
Sources :
« Les belles années de la Provinciale » de Christian Trudeau
(quebec.sabr.org),
« Baseball », Le Canada Français, 9 juin 1949, p.26,
« Entre nous sportifs… » de Marc Brais, Le Canada Français, 27
octobre 1955, p.18,
« Entre nous sportifs… » de Marc Brais, Le Canada Français, 16
février 1956, p.18,
« Certains échevins veulent un autre stade et d’autres demandent un
aréna; le problème sera étudié en janvier », Le Canada Français, 3
décembre 1964, p.17-18,
« Spectacular Fire Destroys Municipal Stadium »,
The News and Eastern Townships Advocate, p.1, 3 décembre 1964,
« Un projet qui grouperait stade, piscine, centre d’art et
marché », Le Canada Français, 10 décembre 1964, p.1,
baseball-reference.com,
quebec.sabr.org.