D’origine canadienne-française, Phil Marchildon est né à Penetanguishene, en Ontario. Si ce n’est qu’à l’école secondaire qu’il s’est mis au baseball, il s’y est découvert un talent certain. S’il débuta comme receveur, il devint lanceur à cause de son bon bras.
Il déménagea plus tard dans la région de Sudbury pour travailler dans une mine, et où il continua à jouer au baseball.
Lorsqu’un ami de la famille eut vent du fait que Dan Howley, le gérant des Maple Leafs de Toronto de la Ligue internationale, allait tenir une école de baseball à Barrie, il suggéra à Marchildon d’y aller, ce qu’il fit.
Sur place, Howley remarqua son talent, même s’il nota quelques erreurs dans sa technique. Il lui offrit donc un contrat. Marchildon lui répondit qu’il y penserait, avant de retourner avec son équipe, avec qui il se rendit jusqu’en finale du championnat provincial. Howley continua alors de l’observer et de lui parler. Il se rendit alors compte que Marchildon souffrait d’un grand complexe d’infériorité. Il réussit tout de même à le convaincre de se présenter au camp des Maple Leafs en 1939, en Floride.
Avec de la patience, Howley prit le temps de polir son diamant brut et de modifier sa motion. Le jeu en valut la chandelle et Marchildon devint l’un des meilleurs lanceurs des pauvres Leafs jusqu’à la fin de la saison 1940. À ce moment, les Athletics de de Philadelphie, avec qui les Maple Leafs avaient un accord de collaboration, achetèrent le contrat de Marchildon pour 7500$. Ce dernier fit donc ses débuts dans les ligues majeures en perdant deux matchs au sein de la pire équipe des majeures.
À sa première saison complète, avec des Athletics toujours aussi misérables, Marchildon réussit tout de même à remporter 10 matchs tout en encaissant 15 défaites.
En 1942, toujours en travaillant sur sa motion, Marchildon parvint à s’améliorer et à remporter 17 victoires (le troisième total de la Ligue américaine), en plus de subir 14 défaites avec une équipe encore pire que la saison précédente. Il était alors le premier Athletic en sept ans à remporter 17 matchs. À noter qu’au cours de deux de ces défaites, Marchildon n’avait alloué que deux coups sûrs.
Ayant touché le même salaire de 5000$ qu’à sa saison recrue, Marchildon s’attendait donc à recevoir un boni, mais le gérant et propriétaire des Athletics, le chiche Connie Mack, ne l’entendait pas ainsi. Comme la guerre faisait rage en Europe, Marchildon préféra donc s’engager comme mitrailleur dans l’armée de l’air. Il partit donc en direction de la Grande-Bretagne.
En 1944, lors de sa 27e mission au-dessus du territoire allemand, son avion fut abattu en mer, à plus de 30 kilomètres des côtes. Après avoir nagé plus de quatre heures et complètement épuisés, lui et son seul frère d’armes qui avait survécu furent secourus par des pêcheurs danois. Malheureusement, ils furent interceptés par les Allemands sur le chemin du retour et capturés. Ils furent donc amenés au camp Stalag Luft III, où Marchildon fut prisonnier de guerre pendant 10 mois. Mal nourri, il perdit beaucoup de poids, en plus d’être témoin d’atrocités. Sentant la défaite qui s'en venait, les Allemands vidèrent le camp et firent marcher Marchildon et les autres prisonniers sur plus de 200 kilomètres dans la neige. Il fut libéré à la fin de la guerre et retourna à Penetanguishene.
À peine de retour au pays, Mack le contacta pour qu’il rejoigne les Athletics. Marchildon lui répondit qu’il n’était pas en état de lancer. En plus d’être dans un état physique lamentable, il avait subi les traumatismes de la guerre et souffrait de dépression. Mack rétorqua qu’il n’aurait pas à lancer. Il voulait simplement l’honorer. Marchildon se remit tout de même à l’entraînement et fut même prêt à lancer avant la journée en son honneur. Mack l’envoya donc dans la mêlée à Chicago et comme il s’y attendait, c’est lui qui se retrouva au monticule à Philadelphie pour sa fête, où on lui remit une obligation de 1000$ et d’autres cadeaux. Par contre, à la deuxième manche, il se déchira un muscle et les ligaments de la jambe.
Comme sa saison était terminée, il retourna à Penetang, où malgré des problèmes de rhumatisme, il fit amplement de ski de fond pour reconstruire sa jambe. Par contre, il n’était plus le type souriant qu’il était, étant devenu plutôt austère et silencieux.
Marchildon n’était pas là au début de la saison 1946 pour des raisons de santé, mais en plus, Mack insista pour lui payer le même montant qu’en 1942, malgré l’excellente saison qu’il avait eu, sous prétexte que nous n’étions plus en 1942, mais bien 1946 qu’il avait une mauvaise jambe. Par contre, s’il avait une bonne saison, il lui promit une augmentation.
Marchildon débuta sa saison et montra qu’il n’avait pas perdu de son efficacité, mais Mack ne lui reparla pas de son augmentation. C’est finalement au milieu de la saison que Mack lui dit qu’il était satisfait de sa performance et lui accorda 8500$. De plus, il lui dit qu’il avait bien lancé en 1942 et lui donna deux billets de 500$. Marchildon termina la saison 1946 avec une fiche de 13-16, au sein d’une équipe qui termina encore dernière, avec un dossier de 49-105.
La saison 1947 débuta plus ou moins bien en termes de résultats. De plus, il développa une intense douleur au bras droit. Son fidèle instructeur des lanceurs, Earle Brucker (celui-là même qui lui avait fait modifier son élan quelques années plus tôt), lui fit alors remarquer qu’il utilisait beaucoup trop sa balle fourchette. Après une semaine de repos, il reprit le collier et changea sa combinaison de tirs. Les résultats furent frappants, puisqu’il remporta 17 de ses 19 dernières décisions.
Parmi celles-ci, il eut un match mémorable, le 26 août, contre Cleveland. En huitième manches, avec deux retraits, Marchildon avait un match parfait, alors que les Athletics menaient 1-0. Avec un compte de 3 balles, deux prises, l’arbitre au marbre alloua alors une quatrième balle controversée. En furie, Marchildon et le receveur Buddy Rosar se mirent donc à enguirlander l’arbitre et à lui envoyer de la terre avec leurs pieds.
Lorsque le jeu reprit, Marchildon obtint un retrait. Il avait peut-être perdu son match parfait, mais pas son match sans point ni coup sûr. Par contre, les Indians créèrent l’égalité en neuvième.
C’est finalement en 12e manche que le match se décida sur un double de… Marchildon, qui lança tout de même un match complet et obtint la victoire, 2-1.
À la fin de la saison 1947, il avait 19 victoires, une seule de moins que le légendaire Bob Feller, et 9 défaites. Cette performance lui valut une bonne augmentation de salaire (17 500$). Et pour la première fois en 14 ans, les Athletics avaient une fiche supérieure à ,500 (78-76).
L’année 1948 fut décevante, alors qu’il fut déclassé comme lanceur numéro 1 à Philadelphie, et qu’il termina avec une fiche de 9-15.
Sa saison 1949 fut écourtée par les blessures et il fut libéré en 1950, année au cours de laquelle il lança un dernier match avec les Red Sox.
Sa fiche en carrière est de 68-75.
Suite à sa carrière, il était hors de question pour ce grand amateur de curling et de ski de vivre en permanence aux États-Unis. Il retourna donc vivre à Penetanguishene avec son épouse et ses deux filles.
Le retour à la vie normale fut pénible. Il était déprimé et amer. Il se trouva tout de même des boulots dans des usines d’avion, puis d’équipements médicaux.
Il fut élu au Temple de la renommée du baseball canadien en 1982 et fit le lancer protocolaire avant le match des Blue Jays à la fête du Canada en 1995.
Il est décédé en 1997, à l’âge de 83 ans.
Sources: “Les Braves s’approchent de Brooklyn et de St-Louis”, 27 août 1947, La Patrie, p.17, ”The Peerless Pitcher From Penetanguishene” de Trent Frayne, April 1, 1948, MacLean’s (archives.macleans.ca), "Phil Marchildon" de Ralph Berger (sabr.org), baseball-reference.com, wikiepedia.org.